Ancien adjoint du maire de Dijon François Rebsamen (de 2008 à 2012), Laurent Grandguillaume s’est fait connaître après son élection en juin 2012 comme député socialiste de Côte d’Or en prenant la défense des auto-entrepreneurs dans le cadre d’une mission qui lui avait été confiée sur le statut de l’entrepreneuriat individuel. Ce jeune élu (36 ans), qui a créé en novembre 2012 le groupe de réflexion “Entreprendre à gauche” avec une dizaine de députés socialistes, fait le point, dans cette interview exclusive, sur le projet de loi Pinel adopté le 21 mai dernier en commission mixte paritaire. Il dresse également une liste de questions en suspens concernant le statut de l’entrepreneur individuel où beaucoup de choses restent à faire.

Etes-vous satisfait du texte adopté le 21 mai dernier ?

Je suis globalement satisfait du texte adopté en commission paritaire (et qui doit être voté le 5 juin prochain) car nous revenons à l’équilibre qui avait été trouvé à l’Assemblée nationale pour satisfaire à la fois les auto-entrepreneurs et les artisans. Les auto-entrepreneurs n’ont pas de limitation dans le temps pour bénéficier de leur statut et n’ont pas de nouveaux seuils de chiffres d’affaires à ne pas dépasser comme cela avait été initialement annoncé par Sylvia Pinel. De leur côté, les artisans ont obtenu que les auto-entrepreneurs qui travaillent dans ce secteur soient obligés de s’immatriculer sur un registre et de suivre un stage de 5 jours préalable à l’installation. Ceux-ci devront également inscrire sur leur facture qu’ils sont bien assurés. L’essentiel des dispositions préconisées dans mon rapport ont donc été adoptées.

Quels sont pour vous les problèmes qui restent en suspens ?

La question du salariat déguisé reste à résoudre, heureusement nous avons pu éviter l’adoption d’un amendement de dernière minute au Sénat qui instaurait une présomption de salariat pour tout travailleur indépendant, ce qui aurait été une catastrophe pour les auto-entrepreneurs. Je préconise pour cette question plus de contrôles de l’Urssaf (il y a actuellement seulement 1500 contrôles effectués par an). Autres questions : celle de la franchise sur la TVA où pour l’instant l’assiette est basée sur le chiffre d’affaires et non la marge brute et celle des charges qui ne sont pas déductibles du chiffre d’affaires et que doit assumer seul l’auto-entrepreneur.

Enfin, il reste à simplifier les différents régimes de l’entrepreneur individuel : la réforme actuelle créé un fonctionnement commun aux auto-entrepreneurs et aux micro-entreprises, mais cela ne suffit pas. Il faut un statut unique de l’entrepreneur individuel qui intègre l’EIRL (Entrepreneur Individuel à Responsabilité Limité) et l’EURL (Entreprise Unipersonnelle à Responsabilité Limitée). Nous allons discuter de toutes ces questions en présence de tous les interlocuteurs concernés au ministère de la Justice. Des propositions doivent être rendues fin juin. Selon moi, deux points essentiels doivent être défendus : la protection du patrimoine du dirigeant et une fiscalité incitative qui permet de distinguer les revenus personnels du dirigeant de ceux de l’entreprise.

Quel est votre calendrier dans les mois à venir ?

Nous allons tout d’abord suivre de près les décrets d’application de la future loi car il faut que tous les principes que nous avons défendus soient gravés dans le marbre. J’entends également suivre la question de la fiscalité des micro-entreprises avec la distinction indispensable à faire entre revenus personnels du dirigeant et ceux de son entreprise. Enfin, je vais proposer une mesure à laquelle je suis attaché : faire en sorte que le premier emploi créé dans une micro-entreprise soit exonéré de cotisations sociales pendant trois ans. Par ailleurs, je devrais présider prochainement une mission d’information de l’Assemblée nationale sur le fonctionnement de BPI-France.

(Propos recueillis par Sophie Lhameen)




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Sophie Lhameen
Sophie Lhameen, journaliste multimédia (web et print), a travaillé pendant 15 ans comme journaliste spécialisée sur l'Afrique avant de devenir en 2008, rédactrice en chef adjointe du magazine Le MOCI (Moniteur du commerce international) jusqu'en janvier 2013. Ses centres d'intérêt : l'entreprise, le management, les ressources humaines, l'emploi, l'économie, l'intelligence économique et de l'international. Google+