Christelle la belle et Johanna la moins jolie postulent pour être assistante de direction. Elles ont le même âge, le même CV… et c’est une seule et même personne qui joue Christelle et Johanna ! Une actrice ! Seulement cette jeune femme est grimée pour avoir un physique et une allure bien moins avantageux que le premier personnage qu’elle incarne : Christelle. Toutes deux envoient une cinquantaine de CV avec photo à des entreprises lyonnaises. Résultat : Christelle décroche 12 entretiens alors que Johanna n’en obtient que 3 ! Et la belle réussit son entretien tandis que la 2e échoue sans plus d’explications.
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Johanna, trop négligée pour être embauchée

L’enquête pourrait s’arrêter là. Car en 20 minutes, les journalistes démontrent qu’un beau physique est toujours plus remarqué qu’un autre, quelconque ou négligé. Mais l’injustice ne s’arrête pas là. En recommençant le test avec un CV plus costaud pour Johanna, la moins jolie, c’est encore Christelle qui s’en sort le mieux bien qu’elle ait des compétences en moins ! Preuve que la beauté est dans le monde du travail un vrai plus, qu’on le veuille ou non.  Et dans tous les secteurs. Le sociologue Jean-François Amadieu, spécialiste de la question* et interrogé sur D8 explique ce phénomène : « L’employeur est victime des stéréotypes et des préjugés. Il se dit que celui qui est mignon est aussi intelligent, successfull, etc. » Des mots qui font écho à ce qu’il ne cesse de répéter depuis des années : dans la société actuelle, « nous établissons inconsciemment un lien entre la beauté et le rang social ou la réussite, comme si les gens de statut social élevé étaient forcément beaux ».
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« On ne prête qu’aux beaux »

Au sein même de l’entreprise, la discrimination s’effectue encore. Les personnes « au physique avantageux » sont souvent mieux considérées, voire davantage rémunérées. Des ségrégations qui ne disent pas leurs noms et qui sont pourtant interdites par le Code du travail. « On ne prête qu’aux ” beaux ” comme autrefois, on ne prêtait qu’aux ” riches “, assène dans son ouvrage** Sylvie Poignonec, chirurgien plastique. Et c’est pour cela qu’on cède aux sirènes de la chirurgie esthétique devenue un recours familier pour retrouver la confiance en soi, pour stimuler l’envie d’entreprendre, pour s’aimer soi-même… »
L’apparence physique s’avérant indissociable de la réussite sociale et professionnelle, la chirurgie esthétique, les cours de relooking et même les produits cosmétiques (surtout pour hommes) n’ont jamais eu autant de succès. Le site web d’un des nombreux acteurs du conseil en image, Coach’n Look l’annonce : se faire relooker, c’est « se sentir mieux dans sa peau » mais également « élargir son tissu relationnel ». Autrement dit : vous vous ferez remarquer si vous avez l’air de prendre soin de vous. Taboue, la discrimination sur l’apparence physique a, hélas, de beaux jours devant elle dans une société où l’image prend une place de plus en plus importante. L’expression « Avoir le physique de l’emploi » n’est pas près de disparaître. Il faut en prendre son parti, voire en tirer profit, en attendant une véritable rupture dans les mentalités.
*Auteur de Le Poids des apparences (Odile Jacob, 2002) et Le livre noir des DRH (Seuil, 2013)
**Co-auteur avec Marie-Pierre Samitier de Faut-il être beau pour réussir ? Chirurgie esthétique et image de soi (La boîte à Pandore, 2015)
pour en savoir plus suivre le lien sur l’enquête de D8