Les chercheurs se cassent la tête depuis des années à propos du bonheur au travail. Trois théories récentes émergent et divergent, à vous de les découvrir et de vous faire votre propre opinion. Résumé librement adapté d’un article de Lilian Polderman du journal MT Management Team.

Kanter : le bonheur, c’est d’être motivé

Rosabeth Moss Kanter, gourou du management, professeur à la Harvard Business School et auteur entre autres de E-voluez! a écrit récemment un essai dans la Harvard Business Review dans lequel elle explique que les salariés confrontés à des défis importants seraient de loin les plus heureux.

D’après Kanter, l’immense problème au quotidien réside dans le fait que les salariés ne se sentent plus concernés et sont tuned off (démotivés). Ceux qui se sentent concernés par les grands problèmes du monde et trouvent des solutions pour les sans-abri, pour résoudre le problème de l’eau potable, etc. sont les seuls à se sentir heureux au travail car ils ont la certitude qu’ils pourront faire quelque chose pour la collectivité.

Kanter identifie les trois facteurs de motivation au sein d’une entreprise : “Mastery”, “Membership” et “Meaning” (maîtrise, appartenance et sens). En résumé, il faut réunir un emploi proposant du challenge, que l’employeur donne l’impression que les salariés sont partie prenante, et que les salariés sentent que leur contribution a du sens.
En revanche le M de “Money” (argent) est exclu des facteurs de motivation, estime Kanter, l’argent est certes une composante, mais il n’est pas le levier qui fait se lever les individus le matin pour aller au travail ou qui les fait se sentir pleinement satisfaits en rentrant chez eux.
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Rao : le bonheur, c’est de se sentir responsable

Srikumar Rao, auteur de Happiness at Work (Le bonheur au travail) et autrefois professeur à la Columbia Business School, a un autre point de vue. Pour lui le plus grand obstacle au bonheur dans l’entreprise est notre sentiment d’impuissance. Ainsi, d’après Rao, il faut simplement changer sa représentation mentale de  la situation. “Prendre conscience du fait que nous sommes personnellement responsables est notre meilleure arme”. Il existe selon lui ni bon ni mauvais contexte.
En résumé, il s’agit d’adapter son point de vue, de se raconter que l’on est reconnaissant pour toute expérience nouvelle et que l’on est prêt pour continuer à grandir via le changement.

Leadership IQ : le bonheur, c’est de ne rien faire

Radicalement différente des deux premières théories, la troisième analyse du bonheur au travail provient du cabinet américain de conseil et de recrutement Leadership IQ.
Selon une enquête récente menée par ce cabinet, ce sont les low performers (pas ou peu performants) qui sont les plus heureux au travail. 42 % des salariés qui travaillent au sein de grosses entreprises savent se rendre discrets pour en faire le moins possible. Ils simulent au bon moment une grosse charge de travail et lorsque leur paix providentielle semble perturbée, ils se cachent encore un peu mieux au sein de l’organisation.
D’après l’enquête, ce sont leurs collègues hautement performants qui font le travail à leur place qui sont insatisfaits. Ils ne se sentent pas reconnus malgré tout leur investissement et sont de plus épuisés du fait de la charge de travail supplémentaire provoquée par leurs collègues invisibles. Du coup, ce sont ces travailleurs les plus performants qui quittent l’entreprise sans regret la laissant aux mains des low performers.

La pyramide de Maslow

Pour Maslow, la motivation et la satisfaction au travail viennent de la volonté d’assouvir des besoins au travail. Un salarié veut satisfaire des besoins, une fois que l’un est satisfait, il cherche la satisfaction d’une autre, jusqu’à atteindre une forme d’accomplissement personnel. La hiérarchie sous forme d’une pyramide définit de haut en bas les besoins d’accomplissement personnel (réalisation de soi), d’estime de soi et des autres (reconnaissance), sociaux (appartenance à un groupe), de sécurité (physique et mentale), physiologiques (conditions matérielles).

Pour avoir un personnel satisfait, on examine d’abord les conditions de travail matérielles (rémunération, charge de travail, hygiène et santé au travail …) élément minimal de motivation, par rapport au sentiment d’accomplissement, à la reconnaissance de la hiérarchie, à la progression individuelle, l’autonomie et la responsabilité au niveau, le soutien social du collectif de travail.

Les modèles de Karasek, Theorell et Siegrist

Ils proposent 3 axes d’analyse pour cerner le bien-être au travail
1 – Les exigences de travail correspondant à la demande psychologique du travail (contraintes cognitives et temporelles, imprévus, morcelées,  ordres contradictoires, interruptions, dépendance vis-à-vis des autres…)
2 – L’autonomie exercée, pouvoir choisi comment opérer et peser sur les décisions, s’organiser, développer connaissances et compétences…
3 – Le soutien du salarié dans son travail, par ses collègues et son manager sur les aspects techniques, le déséquilibre entre gros effort consenti et peu de récompense en estime, promotion, ou salaire …démobilise.

Comment réussir un Plan bien-être des collaborateurs

Lorsqu’on parle du bien-être du salarié, on se réfère à la son job, ses attentes, son niveau de stress et son environnement de travail peut affecter sa santé et son bonheur en général. Le concerne aussi des éléments moins tangibles, comme l’humeur et la cognition. Son bien-être ne peut être atteint qu’au sein d’une entreprise centrée sur le personnel.
Un collaborateur dans un état de bien-être au travail peut développer son potentiel, être productif et créatif, entretenir des relations positives avec les autres, mieux gérer le stress et mieux participer.

Le responsable du bien-être corporate (Chief Happiness Officer ou Well-being Manager)

Un nouveau métier apparait dans l’entreprise : responsable du bien-être corporate (Chief Happiness Officer ou Well-being Manager), qui  pilote l’amélioration de la qualité de vie au travail (QVT). Bien-être perçu collectivement et individuellement au travail et performance de l’entreprise sont liés dans une vision de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE). Avec la pandémie et l’instauration du travail à distance, les conditions de travail à distance varient selon le salarié ce qui affecte la productivité.  L’augmentation du stress, l’incertitude du travail, la distanciation sociale et l’isolement impacte le bien-être social du salarié qui est aujourd’hui une priorité pour l’entreprise.

Les étapes pour réussir un Plan bien-être des collaborateurs

Comme pour tout changement au sein de votre entreprise, réussir un Plan Bien-être nécessite une structure, une planification et une stratégie de communication adaptée. Chaque salarié doit comprendre ses avantages et les managers le soutenir de leur leadership.

1 – Obtenir l’adhésion et le soutien du dirigeant

Plus que jamais, le dirigeant comme tout manager à son niveau, doit devenir le modèle pour les équipes et comprendre son rôle crucial au moment d’une crise. Le salarié en attend soutien, authenticité et accessibilité. Le leader qui se soucie du bien-être encourage l’engagement et la participation du salarié.

2 – Enquêter sur le bien-être de l’entreprise

Pour construire le meilleur Plan, mieux appréhender les peurs, les besoins, désirs, problèmes et préoccupations du salarié, en lui posant des questions sur le bien-être ouvertes, simples et directes.

3 – Faire un Plan Bien-être à partir de l’avis des salariés

Utilisez les commentaires recueillis pour élaborer un Plan bien-être, et surtout n’interprétez pas, ne devinez pas, et décidez de manière pertinente en fonction des commentaires des salariés.

4 – Définir un objectif Bien-être

Selon votre entreprise vous pouvez fixer une objectif tournant autour de thématiques variées telles que l’augmentation de la satisfaction du personnel, de son moral, de sa fidélisation, ou encore sa productivité, la diminution de l’absentéisme, l’amélioration des relations avec la direction…

5 – Lancer le Plan bien-être à l’échelle de l’entreprise

L’efficacité du plan dépend de votre capacité à mobiliser toute l’entreprise et chaque salarié. Il faut personnaliser la communication et s’assurer de sa pertinence, de son ciblage…  en fonction de chaque groupe, de son emplacement, sa démographie, ses intérêts…

6 – Faire la promotion du Plan bien-être

Une communication interne pertinente stimulera la participation de tout le personnel. Chaque salarié doit en comprendre les avantages pour lui et pour l’entreprise. Pour l’encourager à participer, utilisez des messages  utiles et engageants, une vidéo utilitaire, des histoires de salariés, la promotion de formations sur le bien-être… que vous fournirez au moment  opportun.

7 – Impliquer les managers

Le manager étant celui qui a le lien le plus fort avec son équipe doit bien comprendre le lien entre bien-être de son équipe et la réussite de l’entreprise. Son enthousiasme doit soutenir les efforts de son équipe, en lui rappelant les avantages du bien-être, en encourageant des échanges ouverts et empathiques.

8 – Encourager le salarié à participer et solliciter ses idées

Cette approche aide le collaborateur à mieux comprendre son rôle dans la création d’une nouvelle culture autour du bien-être. Le salarié passionné par cette action aide à lancer le plan, en devenant un ambassadeur du bien-être.

9 – Mesurer l’impact du Plan Bien-être

Il est souvent difficile de mesurer le bien-être des collaborateurs, si vous optez pour une solution logicielle vous toucherez plus facilement tout le monde. Combinez ces résultats à d’autres données internes (absentéisme, chiffre d’affaires, santé…) pour développer une image globale de l’efficacité de votre Plan bien-être.

L’Agence Nationale pour l’Amélioration des Conditions de Travail (ANACT)

L’Agence Nationale pour l’Amélioration des Conditions de Travail (ANACT) identifie 6 éléments déterminantes pour la qualité de vie au travail :
les relations sociales et professionnelles : avec les collègues, sa hiérarchie, concernant le dialogue social et le fait de participer aux décisions ;
le contenu du travail (degré d’autonomie, tâches différentes, niveau de responsabilité…)
le contexte physique du travail (sécurité, nuisance sonore, chaleur, lumière, propreté, espace…)
L’organisation du travail (qualité des directives, soutien de l’organisation, solution des dysfonctionnements, pénibilité et prévention des risques professionnels…)
Le développement professionnel (salaire, formation, développement des compétences, sécurité des cursus …)
l’équilibre Vie au travail et vie personnelle (horaires de travail, travail à distance, mobilité…)