L’impact des politiques américaines sur la diversité et l’inclusion en France

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L’impact des politiques américaines sur la diversité et l’inclusion en Europe et en France ? Le 20 janvier 2025, Donald Trump, dès son investiture, a signé un décret exécutif visant à éliminer tous les programmes de diversité, équité, inclusion et accessibilité au sein des agences fédérales américaines et chez leurs fournisseurs. Ce décret, bien que succinct, a des implications profondes, remettant en question ces initiatives en les qualifiant de discriminatoires et illégales. Selon le Président Trump, il était impératif de mettre fin à ce qu’il considère comme un « favoritisme racial et sexuel dangereux, dégradant et immoral » pour rétablir les « valeurs américaines traditionnelles de travail, d’excellence et de réussite individuelle »

La complexité des enjeux pour les entreprises dans un contexte globalisé

Bien que ce décret ne s’applique pas aux entreprises privées, certaines d’entre elles, y compris des multinationales américaines, ont rapidement annoncé des révisions de leurs programmes de diversité et d’inclusion. À l’inverse, d’autres entreprises ont cherché des justifications juridiques basées sur leurs implantations géographiques pour maintenir ces programmes, créant ainsi un équilibre délicat entre valeurs et intérêts économiques. Cette situation met en lumière la complexité des enjeux auxquels sont confrontées les entreprises dans un contexte globalisé, où les politiques nationales peuvent avoir des répercussions internationales.
En France, l’ambassade américaine à Paris a adressé une lettre à ses principaux fournisseurs, les incitant à renoncer à toute politique de diversité. Cette lettre était accompagnée d’un formulaire de certification du respect de la loi fédérale américaine. Et pourtant, la législation américaine n’a aucune force obligatoire sur le territoire français. Cette tentative d’influence soulève des questions sur la souveraineté nationale et la capacité des entreprises françaises à résister aux pressions extérieures tout en respectant les lois locales.

Les implications potentielles pour les entreprises et les politiques publiques en matière de diversité et d’inclusion

Une question se pose alors : quelle influence ces décisions auront-elles en France et en Europe, où la diversité et l’inclusion ont été historiquement encouragées, souvent sous l’influence américaine ? Allons-nous assister à un
« contre-courant » européen en réaction ?
À ce stade, il est difficile de prédire l’ampleur de cette influence. Cependant, il est essentiel de considérer les implications potentielles pour les entreprises et les politiques publiques en matière de diversité et d’inclusion.
En France, le Code du travail interdit strictement les discriminations basées notamment sur l’origine, le sexe, l’orientation sexuelle, ou l’appartenance (vraie ou supposée) à une ethnie, une nation ou une prétendue race.
La discrimination positive est également interdite, sauf exceptions légales, notamment en matière d’égalité des sexes et de handicap. Par exemple, les entreprises de plus de 50 salariés doivent calculer un index de l’égalité professionnelle pour mesurer les écarts de rémunération entre les sexes. De plus, les employeurs de 20 salariés et plus doivent employer des travailleurs handicapés à hauteur de 6 % de leur effectif total, sous peine de contribution financière.

Malgré ces restrictions, de nombreuses entreprises françaises, y compris celles qui ne sont pas des filiales de groupes internationaux, sont, depuis des années, très actives en matière de diversité, d’équité et d’inclusion. Ces entreprises ont souvent adopté des politiques volontaires pour promouvoir la diversité et l’inclusion, reconnaissant les avantages économiques et sociaux de telles initiatives. Elles ont compris que la diversité peut être un levier de performance, d’innovation et d’attractivité, et ont intégré ces valeurs dans leur culture d’entreprise.

Au niveau européen, la directive 2023/970 du 10 mai 2023, visant à renforcer l’égalité des rémunérations entre les femmes et les hommes, doit être transposée par les États membres avant juin 2026. Cette directive témoigne de la tendance européenne en faveur de la diversité, de l’équité et de l’inclusion, encourageant les entreprises à affirmer leur engagement, même si cela pourrait se faire désormais de manière plus discrète. L’Europe semble déterminée à poursuivre son chemin vers une société plus inclusive, malgré les vents contraires venus d’outre-Atlantique

La diversité et l’inclusion, une obligation légale, mais aussi un choix stratégique

En conclusion, bien que les politiques américaines puissent influencer certaines entreprises, la France et l’Europe semblent déterminées à poursuivre leur engagement en faveur de la diversité et de l’inclusion.
Les cadres dirigeants et les directeurs des ressources humaines devront naviguer dans ce paysage complexe, en équilibrant les exigences légales locales et les pressions internationales, tout en restant fidèles à leurs valeurs d’entreprise. Ils devront également être vigilants face aux évolutions législatives et aux attentes sociétales, qui pourraient influencer leurs stratégies en matière de diversité et d’inclusion.Il est crucial pour les entreprises de continuer à promouvoir la diversité et l’inclusion, non seulement comme une obligation légale, mais aussi comme un choix stratégique. En investissant dans ces domaines, elles peuvent renforcer leur réputation, attirer et retenir les talents, et améliorer leur performance globale. La diversité et l’inclusion ne sont pas seulement des questions de conformité, mais des éléments essentiels de la compétitivité et de la durabilité des entreprises dans un monde en constante évolution.
Ainsi, malgré les défis posés par les politiques américaines, les entreprises françaises et européennes ont l’opportunité de montrer l’exemple en matière de diversité et d’inclusion. En adoptant une approche proactive et en intégrant ces valeurs dans leur stratégie globale, elles peuvent contribuer à construire une société plus juste et équitable, tout en assurant leur succès à long terme.
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Julia Gori, Avocate au barreau de Paris, partner du cabinet Simmons & Simmons: Un Master en droit social (spécialisation en droit social international), de l’Université Lyon II (IETL), diplômée de la Boston University School of Law, des études à San Francisco, Californie (États-Unis, elle rejoint le cabinet Simmons & Simmons en 2010. Elle accompagne des clients français et internationaux en droit social français, comme conseil et en contentieux. Dans le cadre de réorganisations stratégiques ( relocalisations liées au Brexit, plans de départs massifs ou intégrations post-acquisition). Elle intervient plus particulièrement auprès des institutions financières, la gestion d’actifs et de l’investissement, et les technologies, médias et télécommunications (TMT). Son expertise couvre les aspects collectifs (élections professionnelles, relations avec les représentants du personnel, accords collectifs, durée du travail, réorganisations, licenciements collectifs, vérifications et dispositifs de contrôle) et les aspects individuels (rédaction de la documentation contractuelle, licenciements, négociations et transactions, dispositifs de rémunération variable et clauses de restriction).