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Signaux faibles, enjeux forts : savoir anticiper pour éviter le pire

Signaux faibles, enjeux forts credit Depositphotos_102770622_S.jpg
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Faillites, restructurations, fermetures de sites industriels : en ce début d’année, l’incertitude laisse place à l’inquiétude. Soyons honnêtes : une part importante des défaillances constatées ne sont pas liées à un retournement soudain et inattendu de la conjoncture. Beaucoup découlent de choix, ou de non-choix, de dirigeants ou de managers. Errare humanum est.

Mais combien de ces erreurs aux conséquences douloureuses auraient-elles pu être évitées ?

L’une des responsabilités les plus lourdes d’un dirigeant d’entreprise est de savoir détecter les signaux faibles, qui portent bien mal leur nom : ce sont en réalité des signaux forts, des indicateurs précoces de tendances inquiétantes et de problèmes à venir. Certes, ils sont souvent subtils, diffus, non quantifiables. Mais leur prise en compte peut permettre d’anticiper et de prévenir des difficultés importantes et même, pour certaines, fatales.

Les signaux faibles ne doivent être ni méprisés, ni cachés. Alors qu’ils apparaissent rarement seuls, leur cristallisation représente un risque majeur. S’ils ne sont pas traités, ils finissent par se multiplier au sein de l’entreprise, s’interconnecter, et conduire au pire. Pour autant, ils ne révèlent, en tant que tels, aucun échec, et même souvent aucune faute grave. Ils doivent être considérés sereinement mais avec une totale lucidité. Ils constituent une opportunité de changement. Pour le dire autrement, on peut et on doit considérer un signal faible comme une chance de s’ajuster, de gagner en productivité et en rentabilité, de bénéficier d’un nouvel atout concurrentiel … bref, de faire autrement et mieux. Non seulement pour éviter la catastrophe et assurer la pérennité de l’organisation, mais aussi pour consolider la croissance de l’entreprise et franchir une nouvelle étape de son développement.

Une situation dégradée avancée qui demande une réaction immédiate et pertinente

Un problème récurrent de liquidité, par exemple, ne doit pas « juste » conduire à jouer avec la trésorerie en repoussant régulièrement les échéances fiscales et sociales, ou celles liées au paiement de ses prestataires : c’est la manifestation d’une situation dégradée avancée qui demande une réaction immédiate et pertinente. Un turnover et un absentéisme particulièrement marqués au sein des équipes ne sont pas seulement des situations RH désagréables : ils révèlent un malaise profond et doivent conduire à penser le changement, à faire évoluer le management, à réfléchir en termes de marque employeur. On pourrait multiplier les exemples, y compris en évoquant des cas qui peuvent paraître anodins mais qui se sont révélés annonciateurs de difficultés importantes : des bureaux systématiquement mal rangés peuvent refléter un défaut d’organisation, un déficit de motivation, une perte de sens.

Il ne s’agit pas de surréagir, mais d’agir en responsabilité. De considérer les signaux faibles comme des appels à prendre des mesures correctives à un stade où il est encore possible d’intervenir efficacement : identifier des problèmes structurels avant qu’ils ne s’aggravent, rediriger les priorités stratégiques pour éviter la détérioration des performances, adapter les ressources humaines ou financières sur les points critiques …

Déterminer les actions à conduire, les prioriser

La détection des signaux faibles demande plusieurs qualités, en réalité plus humaines que professionnelles. D’abord beaucoup d’humilité et de patience. Le professionnel qui traque les signaux faibles ressemble au jardinier qui chasse sans relâche les mauvaises herbes : cela peut sembler fastidieux et répétitif, mais c’est sa responsabilité et son devoir pour obtenir un beau rendu et permettre à ses plantes de croître et de s’épanouir. Ensuite, il faut un mélange d’ouverture, d’écoute, de curiosité, d’attention, de lucidité, de discernement, une capacité à voir et percevoir ce qui échappe aux autres. Enfin le courage est indispensable, celui de mettre des mots sur les maux, de pointer des dysfonctionnements, de dire ce que les autres ne veulent souvent pas entendre. Celui, aussi, de déterminer les actions à conduire, de les prioriser selon un critère de criticité (risque, probabilité de survenance), de les engager et de les mener à leur terme.

La clé de la réussite, c’est l’engagement à tous les niveaux et dans tous les domaines de l’entreprise. La culture nécessaire est celle d’un questionnement permanent, proactif et méthodique. Elle doit s’appuyer sur le recours à des méthodes de détection éprouvées telles que l’analyse de données, l’observation terrain, la veille stratégique, les échanges … Toutes les parties prenantes doivent être sollicitées : les collaborateurs bien sûr, mais aussi les clients, les fournisseurs, l’expert-comptable, le banquier … qui tous ont un regard différent de celui du dirigeant, et donc complémentaire.

Détecter et traiter des signaux faibles exige pour toutes ces raisons une culture organisationnelle ouverte, consciente de sa perfectibilité et des opportunités que représentent ces signaux faibles s’ils sont pris à temps. La responsabilité incombe à la gouvernance : à elle de prouver qu’elle sait se mettre à l’écoute du cœur battant de l’entreprise et échapper à la malédiction qu’est la solitude du dirigeant, son isolement. C’est aussi un défi : embarquer ses équipes dans cette démarche de vigilance et, si besoin, se faire accompagner par le regard extérieur d’un cabinet conseil ou d’un manager de transition.
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Jean-François Pinson, Directeur Associé pour Grant Alexander Executive Interim
Avec un parcours de plus de 30 ans en direction générale, financière et développement en France et à l’international, Jean-François a, au cours de sa carrière, fondé et dirigé en France et à l’International des entreprises dans des secteurs variés (industrie agro-alimentaire, textile, luxe, logiciels, brevets, …). Il se lance en 2005 dans le management de transition et réalise plus de 20 missions de direction générale et de restructuration en France et en Europe dans de nombreux domaines : industrie, bâtiment, services, NTIC, Télécom, grande distribution, négoce, énergie, hôtellerie de plein air. Il rejoint en 2024 le bureau toulousain de Grant Alexander – Executive Interim en qualité de Directeur Associé.