Pour une approche plus saine des conflits au travail à l’ère du travail hybride

Pour une approche plus saine des conflits au travail à l’ère du travail hybride

Par Ellen Kim et Genesis Fisher | Association of Corporate Counsel (ACC)

Les conflits au travail sont non seulement inévitables, mais ils constituent également un élément prévisible de toute organisation. Étant donné que chaque individu vient apporter une grande diversité d’expériences, de styles de communication, d’attentes et de spécificités qui lui sont propres au sein de l’environnement de travail, il faut s’attendre à un certain niveau de friction entre collaborateurs. Lorsqu’elles sont gérées de manière mature, elles peuvent même être constructives. Cependant, sans systèmes ni structures permettant d’anticiper ces moments de désaccord, même les malentendus mineurs peuvent rapidement s’aggraver, nuisant à la confiance, au moral et à la productivité.

Collaborer à distance apporte d’énormes avantages

Le passage au travail hybride et à distance a ajouté de nouvelles dimensions à la manière dont les conflits surgissent et sont perçus. La possibilité de collaborer à distance apporte d’énormes avantages en termes d’inclusivité, de flexibilité et d’accès aux talents. Dans le même temps, elle a fondamentalement changé la manière dont les équipes interagissent, rendant la communication plus fragile et souvent plus sujette à des interprétations erronées. Sans les indices sociaux d’une conversation en face à face, tels que le ton de la voix, le langage corporel ou le contexte partagé, même un message routinier peut être mal interprété. Un simple e-mail peut sembler dédaigneux. Une réponse tardive peut être interprétée comme une manière d’éviter la conversation. Une caméra éteinte pendant une réunion virtuelle peut être considérée comme un signe de désengagement.

Par ailleurs, la disparition des rencontres informelles au bureau, telles que les pauses café ou les discussions spontanées, a entériné les occasions informelles de renforcer la confiance entre collaborateurs, d’apaiser les tensions au travail ou de tout simplement faire preuve d’empathie envers autrui. Ces petites interactions servaient autrefois de ciment social qui aidait les équipes à fonctionner harmonieusement. Sans elles, le risque de malentendus augmente et la distance émotionnelle entre collègues peut s’accroître.

À mesure que ces dynamiques s’ancrent dans notre façon de travailler, les organisations sont confrontées à une question importante. Si les conflits font naturellement partie des interactions humaines et que le travail hybride est désormais une réalité durable, pourquoi si peu d’entreprises s’adaptent-elles à cette situation plutôt que d’attendre que les tensions deviennent incontrôlables ?

Une gamme d’options appropriées pour résoudre les conflits à un stade précoce

La conception de systèmes de résolution des conflits offre une solution. Cette approche consiste à mettre en place des mécanismes internes pour traiter les conflits de manière proactive et structurée. Il s’agit de créer des voies claires et accessibles permettant aux employés de faire part de leurs préoccupations, de résoudre les problèmes et de rétablir les relations de travail. Ces systèmes peuvent inclure des vérifications informelles, un dialogue structuré entre pairs, des discussions facilitées ou des processus plus formels si nécessaire. Un système solide offre une gamme d’options appropriées et peut résoudre les conflits à un stade précoce, avant qu’ils ne deviennent plus graves ou coûteux.

Les services juridiques en entreprise jouent également un rôle essentiel dans ce domaine. Les juristes d’entreprise occupent une position unique pour aider à concevoir des systèmes qui respectent les obligations légales de l’organisation tout en soutenant ses valeurs et ses objectifs. En tant que conseillers stratégiques et gestionnaires des risques, ils peuvent orienter la manière dont les cadres de réponse aux conflits équilibrent la conformité, la cohérence et l’équité.

L’Association of Corporate Counsel (ACC), qui représente plus de 45 000 juristes d’entreprise à travers le monde, continue de soutenir ce type de collaboration entre les responsables juridiques et les responsables des ressources humaines. L’une des ressources pratiques est le Well-being Toolkit for In-house Lawyers (boîte à outils sur le bien-être pour les juristes d’entreprise), qui comprend des conseils sur la gestion du stress, la constitution d’équipes psychologiquement sûres et la conception de systèmes efficaces pour la résolution des conflits sur le lieu de travail.

Modèles hybrides et équipes interculturelles exigent une forte prévention

Lors de l’élaboration d’un système de règlement des litiges, certains principes sont particulièrement importants. La prévention doit être le point de départ. Les organisations ont tout intérêt à définir leurs attentes dès le début, à doter leurs managers des compétences adéquates et à encourager les conversations directes mais respectueuses. Il convient également de proposer plusieurs voies de résolution afin que les employés puissent bénéficier du niveau de soutien adapté à leur situation. Le système lui-même doit être considéré comme fiable et équitable, avec une communication et des processus cohérents qui reflètent les valeurs de l’entreprise. Et surtout, le système doit être régulièrement revu et amélioré, en s’appuyant sur les commentaires des employés et les tendances en matière de conflits pour s’adapter et évoluer.

Dans un milieu de travail où les modèles hybrides et les équipes interculturelles sont la nouvelle norme, les conflits ne sont plus une exception à la règle. Ils doivent être anticipés, compris et gérés avec soin. Les organisations qui prennent le temps de mettre en place des systèmes de résolution des conflits bien pensés réduisent non seulement les risques et améliorent le moral, mais favorisent également une culture dans laquelle les employés se sentent en sécurité pour s’exprimer, s’engager de manière constructive et rester fidèles à long terme.

Le conflit en entreprise n’est pas vraiment le problème en soi. C’est sans aucun doute l’absence d’une réponse satisfaisante et équitable qui l’est.

Paule-Emile ADMIN: