Seconde partie de carrière : urgence d’anticipation, puissance de transformation

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Seconde partie de carrière : urgence d’anticipation, puissance de transformation

Par Blandine Mercier, co-fondatrice de Hello Masters

Alors que les carrières s’étendent sur plus de quarante ans, la seconde moitié de vie professionnelle reste trop souvent abordée comme un simple prolongement, sans préparation ni cap clair. Ni les entreprises, ni les cadres n’anticipent suffisamment les défis spécifiques de cette phase. Pourtant, les risques y sont nombreux : déclassement progressif, perte de sens, invisibilisation, rupture brutale. Face à ces constats, il devient crucial de replacer la seconde partie de carrière au cœur d’une stratégie RH proactive et humaniste, capable de conjuguer performance et durabilité.

Sortir du mythe de la stabilité acquise

Beaucoup de cadres expérimentés s’imaginent protégés par leur ancienneté, leur réseau ou leur titre. Mais dans un monde où les organisations se transforment en continu, l’expérience ne protège plus, elle doit évoluer. L’obsolescence des compétences s’accélère. La technologie redéfinit les fonctions. Le jeunisme s’installe parfois insidieusement dans les pratiques de recrutement. La stabilité professionnelle est devenue relative et ne peut reposer que sur l’histoire passée. Ce n’est pas la loyauté qui sécurise une carrière, mais l’agilité entretenue.

 

Des imprévus structurels qui frappent sans prévenir

Les ruptures professionnelles après cinquante ans ne sont pas marginales. Selon les données de l’Apec et de France Stratégie, près de 60 % des cadres en seconde partie de carrière n’ont pas anticipé leur changement de statut. Dans 53 % des cas, la rupture est subie et non choisie. Il s’agit rarement d’un échec personnel, mais d’un désalignement avec les logiques de transformation des entreprises. Plan de départ volontaire, repositionnement stratégique, évolution culturelle ou générationnelle du management : ces imprévus sont désormais structurels.

Réinventer plutôt que résister : les bons leviers existent
Plusieurs leviers sont à activer sans attendre. La formation continue, en particulier sur les dimensions digitales, managériales et transverses. Le développement d’un réseau intergénérationnel, au-delà de son périmètre habituel. L’ouverture à de nouvelles formes d’activité : missions de transition, consulting, mentorat, formation, gouvernance. La visibilité professionnelle, notamment sur les réseaux sociaux, doit être cohérente avec son positionnement actuel et ses aspirations. Cette démarche ne relève pas du marketing personnel, mais de la lisibilité stratégique.

Les chiffres qui interrogent et appellent à l’action

Les études sont sans appel.

  • 70 % des cadres n’ont jamais anticipé leur seconde partie de carrière
  • Plus de 50 % des ruptures professionnelles après 50 ans sont subies
  • Le temps moyen de retour à l’emploi dépasse 18 mois après une rupture pour un cadre senior
  • Seuls 19 % des cadres estiment avoir une stratégie de fin de carrière structurée

Ces chiffres montrent un décalage préoccupant entre les transformations du travail et la gestion des trajectoires individuelles. Ils révèlent aussi un potentiel d’action immense.

Dix actions concrètes à activer dès aujourd’hui
Une seconde partie de carrière réussie se construit par des gestes simples, accessibles, mais décisifs :

  1. établir un bilan de positionnement professionnel tous les trois ans
  2. identifier et combler les écarts de compétences avec les besoins du marché
  3. maintenir un réseau actif dans et hors de son entreprise
  4. renforcer sa présence numérique sur des plateformes professionnelles crédibles
  5. construire une image alignée de ce que l’on fait, ce que l’on dit et ce que l’on montre
  6. explorer de nouvelles formes d’activité avant qu’elles ne deviennent nécessaires
  7. solliciter des retours réguliers de la part de pairs ou mentors
  8. diversifier ses cercles de reconnaissance au-delà de son secteur d’origine
  9. repérer les signaux faibles de marginalisation ou de plafonnement
  10. envisager une mobilité choisie comme levier de revitalisation

La seconde partie de carrière est un espace-temps où se joue la capacité à durer, à transmettre et à se renouveler. C’est un enjeu personnel, mais aussi un défi organisationnel. Valoriser les talents expérimentés, leur permettre de rebondir, leur offrir des perspectives crédibles, c’est renforcer la cohésion et la performance des entreprises. Cela suppose d’en finir avec les angles morts et d’intégrer cette phase dans une politique RH ambitieuse, équitable et prévoyante. Il ne s’agit plus seulement d’accompagner, mais de reconnaître, d’investir et de faire confiance.

Sources :

  • Étude Apec 2024 : “Carrières des cadres de plus de 50 ans : entre rebond et relégation”
  • Rapport France Stratégie 2023 : “Travail, emploi, compétences : repenser les trajectoires”
  • Article Hello Masters : “Seconde partie de carrière : erreurs classiques, imprévus critiques et leviers d’anticipation”, avril 2024
  • Enquête IFOP pour le cabinet Transformance : “Les cadres et la seconde partie de carrière”, 2023
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Paule-Emile ADMIN: