Plein emploi : et si le vrai frein était politique, plus qu’économique ?
Depuis des années, le plein emploi est présenté comme la boussole de toutes les politiques publiques. C’est devenu un objectif de société, un horizon presque obligatoire. Cet objectif n’est pas illogique en soit étant donné qu’avec le vieillissement des populations, on constate dans la plupart des pays avancés une baisse de la population active, et au Japon par exemple, le taux de chômage s’élève à 2,6 % malgré une croissance très faible depuis 10 ans.
Pourtant, derrière les chiffres en apparence encourageants du chômage, une autre réalité s’impose : celle d’un marché du travail qui avance… mais sans jamais se consolider. Et si, finalement, le principal obstacle n’était pas économique, mais politique ?
Une économie en demande, un climat politique qui hésite
Jamais les besoins de recrutement n’ont été aussi forts. Tous les secteurs du numérique à l’industrie, de la santé à la logistique peinent à attirer, fidéliser, ou simplement trouver les bons profils. La demande est là, les moyens aussi. Mais le climat général, lui, reste fragile.
Ce n’est pas l’économie qui freine l’embauche : c’est la politique.
Les entreprises évoluent dans un environnement devenu illisible : changements de cap politiques, réformes de l’emploi en suspens, fiscalité du travail fluctuante, négociations sociales à géométrie variable. Chaque changement de gouvernement ou de cap social crée un nouvel épisode d’attentisme.
Résultat : les dirigeants temporisent, les embauches se reportent, les projets se figent.La France vit dans une économie d’intentions, plus que d’actions.
Quand la confiance s’effrite, l’emploi se fige
L’économie et le marché de l’emploi repose avant tout sur un climat de confiance. Or, celle-ci se construit sur la lisibilité des politiques publiques. Chaque alternance, chaque remaniement, chaque annonce contradictoire agit comme un signal d’alerte.
Les DRH et dirigeants d’entreprises, déjà confrontés à un contexte économique tendu, préfèrent souvent attendre que le paysage se stabilise avant d’engager durablement de nouvelles ressources. Ceci est encore plus vrai dans les PME et les TPE qui sont le principal réservoir des nouveaux emplois.
C’est ce que j’appelle l’effet gel : une économie qui a les moyens d’embaucher, mais qui s’en abstient faute de visibilité.
Les conséquences sur le terrain : perte de repères et désalignement
Chez Meteojob, nous observons régulièrement ces phénomènes : les volumes d’offres fluctuent à l’approche d’échéances politiques majeures. Pendant quelques mois autour des échéances, nous constatons une baisse sensible du nombre d’offres d’emploi proposées (près de 10 %).Les entreprises hésitent à recruter durablement ; dans le même temps, les candidats hésitent à se repositionner, à changer de région, voire à se reconvertir.
L’instabilité politique se traduit alors par un désalignement important entre l’offre et la demande, au moment même où la tension sur le marché de l’emploi n’a jamais été aussi forte.
Vers une politique de l’emploi fondée sur la stabilité et la cohérence
Atteindre le plein emploi ne se résume pas à stimuler les créations de postes ou à financer des dispositifs. Cela suppose une stabilité de cap et une cohérence dans les réformes, capables de rassurer l’ensemble des acteurs du marché.
La France n’a pas besoin d’une énième réforme du travail mais d’une ligne claire qui permette aux acteurs économiques de se projeter dans la durée.
L’emploi n’est pas qu’une donnée économique, c’est une question de confiance collective
Le plein emploi ne se décrète pas. Il se construit. Il ne dépend pas seulement des cycles économiques ou des dispositifs d’aide, mais avant tout de la confiance qu’un pays inspire à ceux qui y travaillent et à ceux qui y entreprennent.
L’économie française a les moyens de créer massivement des emplois ; ce qu’il lui manque, c’est un cap politique durable, capable de rassurer et d’aligner tous les acteurs.
Tant que cette stabilité ne sera pas au rendez-vous, nous continuerons à courir après le plein emploi… sans jamais l’atteindre vraiment.