Voyons ici comment il s’agit en réalité d’un véritable atout. En effet, les fruits de l’Intelligence Culturelle sont nombreux : aisance d’intégration en équipe, meilleures capacités de jugement et prise de décision, plus de réussites dans les négociations, confiance accrue, partage facile d’idées et innovations, plus d’efficacité du leadership.

L’importance de l’intelligence culturelle dans la performance des organisations

Nous savions déjà que l’intelligence pouvait revêtir plusieurs facettes et celle-ci, l’Intelligence culturelle, paraît bien singulière. Décrite de bien des manières, Earley et Ang (2003), pionniers en la matière dans le Management, nous en donnent une intéressante définition. Du point de vue de l’entreprise « c’est un ensemble harmonieux de comportements, de politiques, de procédures et de services qui permettent aux gestionnaires d’embrasser les différences culturelles avec les employés, les clients, les tiers et qui les amènent à adopter des pratiques de gestion personnalisées et adaptées (…) ».
Le  sujet de l’intelligence culturelle du Manager prend toute son importance dans le contexte des sociétés où la diversité est plébiscitée pour sa valeur ajoutée dans la performance des organisations.

Les 3 postures possibles d’un manager dans un environnement multiculturel

Dans  un  environnement  multiculturel, un Manager peut y adopter 3 postures  possibles :
soit il prend le parti d’ignorer la diversité culturelle et d’adopter une posture uniformisée à laquelle tous doivent se conformer – A Rome, faisons comme les romains.
soit il adapte son Management à la pluralité des origines – Travaillons comme un allemand avec les allemands et tel un suédois avec les suédois.
soit il transcende la diversité en ayant une stature de Manager porteur de valeurs partageables par tous – Qui m’aime me suive.
La première posture du Manager, la plus naturelle, est en réalité un statu quo : demeurer conforme à sa propre culture sans se soucier de celle de l’autre.
La deuxième est celle d’un Manager qui s’intéresse à ses collaborateurs et souhaite créer des affinités supplémentaires à la relation hiérarchique établie.
La troisième est celle d’un leader, décrit dans l’ouvrage Kungolo Baade Baba Zoumanigui (ancien  Directeur IBM), « ce Manager qui (…) n’a pas peur de confronter ses idées avec celles de ses collaborateurs, et se positionne comme un inspirateur de valeurs cardinales universelles : le travail, le courage, l’intégrité et la responsabilité ».
Vous l’aurez compris, l’intelligence culturelle idéale est ce mélange de leadership et de Management adapté et empathique. Cette intelligence  interpersonnelle consiste à savoir échanger avec une personne d’un référentiel culturel différent et de tenter au mieux de s’y conformer, l’intention vraie étant aussi louable que le résultat escompté. Aussi est-il bon de savoir que se comporter d’une manière neutre et/ou inadaptée pourrait créer, au-delà des apparences professionnelles bien maîtrisées (réactions masquées), des incompréhensions, des quiproquos, des doutes voire même des désaffections prononcées.
Autant de choses nuisibles à la bonne cohésion d’équipe et donc à sa performance. Pour illustrer nos propos, sachez que de dire «non» à une personne sera perçu de façon très différente selon qu’elle est de culture africaine, asiatique ou nord-américaine. En effet, le «non», très mal vu en Afrique, est du domaine de l’opposition et de l’absence d’empathie si bien que l’on n’y dit pas « non » mais plutôt « je vais apprécier si cela est possible ». De la même manière, des propos prononcés à un asiatique ou à un latino-américain peuvent être jugés offensant alors même qu’ils seraient banals pour un français ou un belge de nature plus taquine.
Une phrase aussi anodine que « Ne soyons pas bêtes » lancée dans une réunion pourrait créer des sentiments inattendus chez la culture étrangère non avisée. Dans un autre registre, alors que l’on pourrait assister à des remontrances ouvertes entre un directeur et son employé dans une entreprise française, cela ne serait tout simplement pas tolérable aux Etats-Unis ou aux Pays-Bas où la violence verbale n’est pas acceptable dans les relations de travail et encore moins en public (L’entreprise étranglée, ouvrage de Baye DIAGNE).
Enfin, est-il intéressant de savoir qu’omettre de dire « bonjour » à un Sénégalais, par exemple, pourrait avoir un impact négatif sur l’engagement de ce dernier à moyen terme. En effet, la salutation, en Afrique de l’Ouest, est une marque de considération et bien plus encore lorsqu’elle s’accompagne d’une franche poignée de main et d’un regard  dans les yeux. Cette même façon de se saluer étant bien différente de la coutume japonaise de la révérence avec la hiérarchie.

Les avantages de l’intelligence culturelle

Dans son livre paru en 2014, The Culture Map : Breaking Through the Invisible Boundaries of Global Business 2, l’américaine Erin Mayer, professeure en management interculturel à l’Institut européen d’administration des affaires (INSEAD) propose huit intéressants axes d’analyse de l’intelligence culturelle en entreprise:
– l’art de communiquer
– la façon d’évaluer l’autre
– la manière de mener les hommes
– la prise de décision
– la façon de faire confiance
– les situations de désaccord
– la gestion du temps
– l’art de convaincre.
Il y a donc tout intérêt à faire preuve d’intelligence culturelle : au-delà des écueils à éviter, il est créé avec l’autre culture une relation plus ouverte, plus compréhensive/tolérante des différences interpersonnelles et donc une relation  plus porteuse de confiance mutuelle.
Et c’est en ce dernier point que réside un grand avantage de l’intelligence
culturelle : nouer une relation de confiance avec ses collaborateurs est le lit de la motivation, de l’engagement, du dépassement de soi, de l’altruisme, de la loyauté et donc le fondement idéal de la performance collaborative. Cela étant dit, comme toute intelligence, elle comporte une part d’apprentissage/de développement qui n’est pas nécessairement naturelle. Aussi existe-il des méthodes et des outils à employer pour accroître son intelligence culturelle. C’est ainsi que des centres de formation dédiés ont vu le jour : ces derniers sont là pour développer les compétences interculturelles des individus et des organisations au moyen de tests d’évaluation tels que celui du Quotient Culturel (QC). Dès lors, de grandes organisations telles qu’IBM, Unilever, Coca Cola, Google et des établissements d’enseignement tels que Stanford  University ou HEC ont pu bénéficier d’un accompagnement du Cultural Intelligence Center (Michigan). A quand votre test ? 2 Ouvrage traduit en 2016 en français sous le titre La carte des différences culturelles : 8 clés pour travailler à l’international
1 Delivering Through Diversity, rapport de McKinsey & Company, 2018