Confrontées aux nouvelles attentes de leurs collaborateurs, les organisations doivent revenir aux fondamentaux : une culture d’entreprise solide, ainsi que des pratiques managériales de qualité. C’est à cette condition qu’elles pourront créer à nouveau un esprit collectif en leur sein.

La symétrie des attentions est un concept largement diffusé selon lequel le client d’une entreprise ne peut être pleinement heureux que si les collaborateurs de celle-ci le sont également. Ce principe est corroboré par de nombreuses études, dont celle de l’IFOP, réalisée en 2020 pour Wittyfit et SIACI Saint-Honoré, dans laquelle 81 % des salariés déclarent que le bien-être au travail est un enjeu prioritaire dans leur société (chiffre qui a bondi de 25 points en seulement deux ans).

Mais le bien-être au travail ne se résume pas à proposer aux salariés de beaux bureaux ou des ordinateurs dernier cri. Le bien-être au travail, que l’on peut aussi appeler, de manière plus globale, l’expérience collaborateur, va bien au-delà de critères exclusivement matériels. Il repose avant tout sur une solide culture d’entreprise. Selon une étude intitulée « Mission & Culture » menée par Glassdoor en 2019 dans quatre pays (États-Unis, Royaume-Uni, France, Allemagne), 77 % des personnes interrogées tiennent compte de la culture d’une entreprise avant de postuler à un emploi, et 79 % prennent en considération sa mission avant de soumettre leur candidature.

Bien-être au travail et culture d’entreprise : 2 faces d’une même pièce

La culture d’entreprise repose tout d’abord sur une mission claire. La mission est la raison d’être de toute organisation, l’orientation principale qui guide l’ensemble de ses décisions stratégiques. Elle doit être expliquée, détaillée, et compréhensible par tous. D’une mission claire découle une vision claire. Elle permet à chaque collaborateur de comprendre l’objectif à long terme (5 à 10 ans) que l’entreprise se fixe et les moyens qu’elle se donne pour l’atteindre. La construction d’une vision ne produit de réels effets que si elle est coconstruite avec les salariés et qu’elle les aide à comprendre l’importance de leur travail au quotidien.

Une culture d’entreprise ne serait cependant rien sans un ensemble de valeurs. Ces dernières correspondent aux principes moraux et sociétaux prônés au quotidien par l’entreprise. Jouant un rôle fondamental dans la construction d’une culture d’entreprise, les valeurs favorisent la cohésion et l’implication des collaborateurs en les fédérant autour de principes partagés par tous. Elles nécessitent d’être régulièrement rappelées et expliquées à travers les actions de communication interne et surtout, d’être illustrées par des rites. Ces pratiques collectives et moments vécus par tous les collaborateurs à intervalles réguliers (célébrations, séminaires, sessions d’intégration, de valorisation ou de management…) consolident le sentiment d’appartenance à l’entreprise. la culture d’entreprise que nous voulons.

Parce que le monde du travail évolue de plus en plus vite, il est important que les valeurs de l’entreprise suivent ce mouvement et s’actualisent à leur tour d’autant qu’elles sont le seul rempart au désengagement des collaborateurs et à la désertification des bureaux. Ni sacralisées, ni figées, elles doivent également être valorisées. D’ailleurs, en matière de motivation à changer d’employeur, l’adéquation entre les valeurs du collaborateur et celles de l’entreprise est significativement passée devant la rémunération[1]. Bref, l’engagement passe par l’engagement.

L’exemplarité du management en question

La culture d’entreprise doit être incarnée par tous les collaborateurs, de l’employé au cadre dirigeant. C’est un projet qu’il faut construire de manière collective. Mais, au quotidien, les cadres se doivent de donner l’exemple, notamment par des pratiques managériales bienveillantes, en phase avec les nouvelles attentes des collaborateurs.

Manager par la confiance est ainsi devenu un prérequis. La montée en puissance des modes de travail hybride a en effet profondément modifié l’attitude des salariés vis-à-vis de leur employeur et du travail en général. Les collaborateurs sont de plus en plus attentifs au degré d’autonomie qu’on leur accorde et au niveau de responsabilité qu’on leur confie. Qu’ils travaillent à distance ou en présentiel, seules la qualité et la pertinence de leurs réalisations doivent être évaluées.

Les managers ont donc comme mission de définir des périmètres d’action précis et de coconstruire avec leurs équipes des objectifs à la fois collectifs et individuels. En emmenant leurs coéquipiers vers plus d’autonomie, les cadres de l’entreprise doivent progressivement accepter que des prises de décision soient réalisées sans leur aval. La meilleure façon d’atteindre leurs objectifs est la plupart du temps de s’effacer au profit de leurs collaborateurs.

Réciprocité de l’enrichissement

Le bien le plus précieux d’une entreprise, ce sont ses collaborateurs. Ce sont eux qui par leur travail, leur implication, et leurs apports enrichissent l’entreprise. Le langage RH désigne d’ailleurs ce concept par le terme un peu brutal de « capital humain ».  Si l’un des rôles fondamentaux traditionnellement joué par l’entreprise est d’enrichir ses actionnaires, elle ne doit pas oublier que l’enrichissement de ses collaborateurs fait désormais partie de ses missions les plus essentielles. Cet enrichissement n’est pas uniquement pécuniaire ‒ basé sur une transaction entre production et rétribution ‒ mais passe aussi par une quête de sens, un partage de valeurs et une recherche d’une meilleure qualité de vie. La valeur du travail enrichit l’entreprise, mais elle ne vaut que si l’entreprise est capable d’enrichir ses collaborateurs. Une vérité à ne pas occulter à l’heure où les offres d’emploi ont de nouveau atteint le niveau de 2019, où les entreprises rencontrent des difficultés pour recruter, et où les candidats comme les collaborateurs se posent des questions autour du sens et du rapport au travail.

C’est à ces conditions que l’esprit collectif, qui fait aujourd’hui tant défaut à bon nombre d’entreprises, se reconstituera et que l’engagement des salariés, qui s’est étiolé tout au long de la crise sanitaire, se renforcera. Les organisations, quelle que soit leur taille et quel que soit leur secteur d’activité, font face à un impératif : elles doivent auditer leurs pratiques managériales au regard des nouvelles attentes des collaborateurs. L’enjeu est de taille : il s’agit de leur offrir la meilleure expérience sur l’ensemble de leur parcours, depuis leur onboarding jusqu’à leur départ, en passant par le développement de leurs talents. Autant dire qu’il convient d’être solide sur les valeurs, de donner une image claire de l’organisation, d’ajuster dès que nécessaire et de favoriser la coresponsabilité. Parce que l’un des enjeux RH 2022 est de  réactiver le collectif, les entreprises doivent dresser un bilan objectif pour mieux se connaître et mettre ainsi en place tout ce qui pourra favoriser le travail en commun.

C’est ainsi que s’instaure un climat de confiance où un départ n’est pas toujours synonyme d’une rupture définitive. De ce point de vue, le retour d’anciens collaborateurs peut être interprété comme un très bon signe de la santé d’une marque employeur. Dans ce contexte, les DRH sont confrontés à de nouveaux enjeux, dont celui d’accompagner les cadres dirigeants et managers dans les défis qui se présentent à eux. Les DRH doivent jouer le rôle de guides et mettre en œuvre des démarches de formation, de coaching et de partage des expériences. Cela constitue une véritable nouvelle frontière à explorer.
[1] Baromètre RH Automne Hiver 2021 – Repères