Surcharge, sentiment d’impuissance… 3 Français sur 4 craignent et refusent de manager des équipes. A l’heure d’une redéfinition du rapport au travail, comment redorer le blason des fonctions managériales et à responsabilité ?

Pourquoi manager, quand on peut profiter de son temps libre ?

C’est ce que se disent de plus en plus de talents, jeunes ou moins jeunes. Comme le souligne un récent rapport de la Fondation Jean Jaurès, un renversement de paradigme s’est opéré chez les salariés français depuis un peu plus d’une décennie. 61% des salariés Français préfèrent désormais gagner moins d’argent mais avoir plus de temps libre. A titre de comparaison, ils étaient 62% à indiquer au contraire préférer gagner plus d’argent au détriment du temps libre en 2008. Un bouleversement inédit qui traduit les transformations sociales et l’évolution du rapport au travail, en particulier depuis la période Covid. Dans ce contexte, redonner goût à la fonction managériale implique de repenser le management à l’aune des enjeux d’aujourd’hui.

Plus qu’une promotion, être manager constitue une compétence

D’après l’Ifop, près d’un tiers des salariés (32%) déclarent exercer une fonction d’encadrement. Sur cette base, il y aurait donc environ 8 millions de managers, si l’on considère les 25,2 millions de salariés estimés par le ministère du Travail. Un chiffre conséquent qui illustre l’importance des postes de supervision dans les différentes organisations. Pourtant – et cela n’est en aucun cas péjoratif – tout le monde n’est pas fait pour ce type de fonction.

Il est vrai que le parcours professionnel d’un jeune talent est souvent tracé d’avance : il se confronte au monde du travail, découvre la diversité des missions qui lui sont demandées, puis, une fois qu’il les maîtrise suffisamment, il prend la tête des jeunes diplômés qui lui succèdent. Ainsi naît le manager ex nihilo. Néanmoins, comme le rappelle la philosophe Julia de Funès : « vous êtes bon techniquement, vous devenez presque automatiquement manager. Or, c’est une compétence. ».

Et c’est bien là le noeud du problème. Au prétexte de son excellence opérationnelle, une direction d’organisation juge l’individu apte à se fracasser contre le mur d’exigences que dressent ses futurs subordonnés : veiller à la qualité de vie au travail, fixer un cap aux équipes ou encore motiver ses talents. Répondre à ces besoins n’est pas une chose innée. Et ce, alors que seuls 4 managers sur 10 ont été formés au management. Un manque qui explique les difficultés du management « à la française », mais également le désamour vis-à-vis de la fonction managériale.

Redonner du sens au travail du manager

Pour mieux répondre aux attentes des collaborateurs et redonner du sens aux fonctions d’encadrement, insuffler plus de démocratie dans le management parait essentiel. Cet objectif gagne à s’organiser autour d’un fil rouge clair : rendre les salariés acteurs et non spectateurs des transformations actuelles considérables des entreprises. En pratique, cela se matérialise par trois piliers : l’écoute, la reconnaissance et la participation.
A ce titre, la dernière enquête Pulse of the Profession confirme l’importance de ces power skills – ou compétences interpersonnelles fondamentales – pour la pérennité des organisations. Ainsi, pour les organisations qui délaissent ces power skills, la perte d’investissement due à la mauvaise performance des projets atteint le double des pertes que subit une organisation qui cherche à les développer. De même, 92% des professionnels interrogés déclarent que les power skills permettent de travailler de façon plus efficace. Leur acquisition par les managers s’avère donc indispensable pour garantir la réussite de leur mission et, bien entendu, des projets menés. D’après une enquête Ifop pour S2H réalisée en février 2022, 68% des managers déclarent en effet exercer un métier susceptible d’entraîner des conséquences négatives sur leur santé mentale (situations de stress, pression psychologique…) contre 60% pour la moyenne des salariés. Face à ces risques pesant sur leur bien-être, la formation aux power skills et la redéfinition du sens de rôle de manager font figure d’incontournables pour redynamiser l’attrait de la fonction. Car on ne nait pas manager, on le devient !