Harcèlement sexuel et violences ordinaires au travail en augmentation avec l’épidémie : comment gérer les situations d’urgence, en particulier en mode hybride ? Comment en faire une opportunité d’attractivité et d’engagement des collaborateurs ? Ne subissez plus, agissez ! La bonne recette.

Désormais, outre les propos ou comportements répétés à connotation sexuelle, les propos ou comportements à connotation sexiste pourront également constituer un harcèlement sexuel. Cette nouvelle définition entre en vigueur le 31 mars 2022. L’employeur s’expose à des poursuites pénales. Il a le devoir de prévenir ce risque. Avant la pandémie, la loi et l’affaire Weinstein avaient déjà contribué à libérer la parole. Au sortir de la pandémie, la situation est pire : les chiffres de cas de harcèlement sexuels sont exponentiels.

2 à 3 fois plus de situations de harcèlement signalées avec la pandémie qu’auparavant

Avec l’épidémie, les personnes se voyaient forcément moins, confinement oblige. Nous aurions pu croire que le nombre de cas de harcèlement sexuel diminuerait. Cela a été tout l’inverse : les cas signalés ont fortement augmenté.

Il y a plusieurs explications à cet effet imprévu de l’épidémie. La première est le fait de passer d’un mode de travail en proximité à un mode par écran interposé : cela modifie forcément les mécaniques de la relation humaine. Les travailleurs perdent les zones informelles de régulation, par exemple les discussions sur le pas d’une porte à la sortie d’une réunion. Ces zones permettaient de réguler les dysfonctionnements du monde du travail. Qui dit zéro temps de régulation dit non-récupération et donc explosion des conflits latents. Le mode de travail hybride, avec le découpage naturel de temps de concentration chez soi et temps d’échange en entreprise, a certes permis une certaine régulation.

Deuxième explication : le choc du confinement et la confrontation à la mort ont enclenché la mécanique du traumatisme. Les individus se sont recentrés sur l’important. Cet effet – bénéfique – a fait ressortir qu’ils étaient moins disposés à accepter certaines choses. En 2020, le mouvement #balancetonagency, dénonçant les comportements abusifs en agence de publicité, est un exemple du besoin d’exprimer le déséquilibre et libérer la parole.

Résultat : l’enjeu du harcèlement est bien plus présent qu’hier. A tel point qu’aujourd’hui les organisations craignent de devoir gérer un important déversoir de plaintes ; de devenir le bureau des pleurs au détriment de leur performance.
Pourtant, prendre le sujet du harcèlement sexuel et des violences ordinaires au travail constitue une véritable opportunité pour les organisations… Tout du moins si elles conçoivent bien qu’il convient de prendre le taureau par les cornes.

Ne plus subir mais agir. La recette en 4 étapes

Oui mais comment ? A celles qui sont prêtes à miser sur la proactivité, nous préconisons une recette en quatre étapes :

1ère étape : affirmer

En préalable de toute la démarche, il convient de reconnaître que le harcèlement ne doit pas avoir sa place dans l’organisation. Et il est crucial que cette reconnaissance émane du top de la direction.
Pour autant il ne suffit pas, et il serait trop simpliste, de faire porter la faute aux seuls harceleurs et de les congédier. Tels des hommes fusibles, ils devraient payer pour un système dont ils sont également les victimes. Il n’y a pas de pauvres harcelés et de méchants harceleurs. Tous sont victimes d’un mode de fonctionnement de la société mettant sous tension les salariés. Au fond l’existence des harceleurs met en exergue les problèmes relationnels résultant d’un dysfonctionnement de la société.

2ème étape : éduquer

Le problème du harcèlement a en fait cette vertu de permettre de mieux cadrer les relations humaines au travail. Quels sont les bons et les mauvais comportements ? A l’organisation d’être bonne pédagogue et d’expliquer comment bien vivre ensemble. Nous nous apercevons que cette éducation engendre deux types de réaction. Certaines personnes ne vont pas changer fondamentalement leur manière de penser mais vont adapter leur comportement afin de se mettre en conformité avec la loi ; d’autres vont profondément modifier leur mindset parce qu’elles ont compris les raisons viscérales de cette nécessité de changement.

Concrètement, cette éducation passe par la présentation de multiples situations que les collaborateurs ont vécues, ou pourraient avoir vécu, dans leur quotidien. L’essentiel est d’interagir et discuter. De faire prendre conscience que chacun est responsable de la manière dont son interlocuteur interprète ses propos. Car ce qui compte en matière de harcèlement et de violences, c’est bien la perception du receveur et non celle de l’émetteur. En matière d’éducation il convient d’agir vite. Une vaste opération coup de poing qui soit le sujet autour de la machine à café.

3eme étape : donner les moyens 

L’organisation doit mettre en œuvre tous les moyens nécessaires pour qu’à aucun moment le collaborateur n’ait une quelconque crainte de signaler une situation de harcèlement. Cela peut ainsi être la création d’un canal de signalement, un dispositif d’alerte, un numéro vert afin que tous puissent s’exprimer le plus rapidement possible.

4eme étape : traiter les situations

Une fois signalées, les situations détectées comme relevant de harcèlement doivent être traitées de manière très investie : protocole d’enquête, référent recevant les signalements et les analysant… Chaque signalement fait l’objet d’une enquête approfondie. Chaque cas avéré implique une application systématique de la loi et une sanction. Le sujet nécessite des décisions fortes.

Accueillir la libération de la parole pour partir sur des bases saines

Attention à l’appel d’air ! En choisissant de prendre à bras le corps le sujet de la lutte contre le harcèlement et les violences ordinaires, vous allez – forcément – ouvrir la boîte de Pandore. Soyez prêts, pendant une période de six mois environ, à ce que les situations problématiques ressortent. Cet exutoire est sain. Il est le signe positif d’une libération de la parole. C’est le point de départ d’un nouveau mode relationnel avec des équipes plus soudées et plus engagées. Votre organisation est, de manière bien plus forte qu’auparavant, en capacité de faire face au changement auquel toutes sont confrontées actuellement.