On le sait, l’innovation est au cœur de toute stratégie d’entreprise. Pour s’adapter et résister dans ce contexte ultra concurrentiel une des solutions consiste à mettre en place des programmes d’innovation. Attention, nous ne parlons pas de programmes d’intrapreneuriat à l’ambition de créer la nouvelle start-up innovante mais bien d’un programme qui va utiliser l’intelligence collective pour remonter les problématiques terrain. Avec la bonne méthode, ces programmes deviennent un véritable tremplin de croissance et permettent à toute entreprise de rester maître de leur marché.

Les différents programmes d’innovation

Avec plus de 40 grands groupes accompagnés, nous avons appris un certain nombre de pratiques que nous souhaitons vous partager :
Quand on parle d’innovation, il existe principalement deux types de programmes : le programme d’innovation cadré et le programme ouvert (qui seront détaillés un peu plus bas).

Deux programmes qui s’adaptent en grande partie aux différentes problématiques et secteurs d’activités des grandes entreprises. Cependant, on continue de se questionner ! Les programmes ouverts et cadrés ont tous les deux leurs points forts (vitesse d’exécution, forte génération d’idées…) et leurs points faibles (difficultés à trouver des sponsors, manque de temps sur l’exploration…)

Nous pensons que dans certains cas, un troisième programme hybride entre les deux pourrait être plus adapté ! Une méthode moins conventionnelle qui apporterait à chaque entreprise l’assurance de générer des projets viables. Avec ce nouveau modèle, les entreprises seront plus enclines à saisir les idées innovantes, créer de la valeur et de nouvelles opportunités.

Le modèle ouvert : un modèle intermédiaire et plus flexible

Pour ne citer que quelques-unes de ses qualités; il offrirait un meilleur sourcing, plus de temps pour la phase d’exploration, des hypothèses marchés réellement validés et une phase d’atterrissage cadré permettant de s’assurer que les projets vivront au sein d’une business unit après la fin du programme d’innovation. Bref, un nouveau modèle avec plus de bénéfices.

Créer un programme d’innovation, comment ça fonctionne ?

Pour concevoir un programme, il faut tenir compte de la stratégie globale du groupe, des besoins opérationnels des différentes business units et des choix de la direction innovation. Le tout en attirant des sponsors internes à l’entreprise pour financer le projet ! Pour l’instant, comme dit dans l’introduction, principalement deux modèles cohabitent : le programme d’innovation cadré, le programme d’innovation continu.
Comprenons plus en détail ces deux types de programmes et dans quel cadre la mise en place d’un 3ème programme serait opportun.

Le programme d’innovation cadré

C’est le dispositif le plus courant. Pour faire simple, c’est un programme dont le but est de “secouer” l’entreprise et développer la culture de l’innovation au sein de l’entreprise, des BU et auprès des collaborateurs. Il se veut comme un rassemblement annuel ou biannuel de l’innovation.

Il se traduit par un accompagnement des projets en entonnoir. L’ensemble des projets suivent successivement et simultanément les phases d’Exploration marché /Product market fit (produit répondant parfaitement à son marché) et industrialisation avec un jury de sélection entre chaque phase.
Ici, l’objectif principal des entreprises est de créer une culture d’entreprise fondée sur l’innovation avant de privilégier le résultat. L’appel à projet arrive en réponse aux problématiques des différentes Business Units. Ce programme à l’avantage d’être rapide, facile à gérer (tous les projets avance à la même vitesse) et l’appel à projet fait du bruit (toute l’entreprise est au courant des différents projets en cours, ce programme génère une forte dose d’inspiration !).

Mais qui dit structure facilement mise en place dit aussi validation rapide des projets, manque de flexibilité et limite dans le champ d’action. Les projets et les collaborateurs suivent la “marche forcée” insufflée par le programme. Lors de la phase d’écrémage des projets (premier jury) l’arbitrage est rapidement fait entre les projets “tués” et les projets “gardés”.

Les équipes ont peu de temps pour trouver un potentiel pivot : les projets démarrent au même moment et disposent de la même durée pour finaliser leurs explorations. De façon exagérée, ce sont les projets effectuant l’exploration la plus rapidement qui ont plus de chances de passer à l’étape suivante (et une idée prometteuse mais non aboutie au premier jury sera tuée trop tôt).

Ce rapide arbitrage est à double tranchant : le projet ne peut pivoter ou pivote trop rapidement. Par manque de temps, il arrive que des hypothèses encore tièdes soient validées. Les résultats sont biaisés, les groupes projets passent trop vite à l’étape suivante. Une fois arrivés en phase d’industrialisation, ils constatent que le projet ne fonctionne pas. Mais c’est trop tard ! 

Illustrons l’importance du pivot avec un exemple, Stewart Butterfield, le co-fondateur de Slack et Flickr, un service de messagerie à destination des entreprises. À l’origine, il souhaitait créer un jeu-vidéo “sans fin”, par manque de financement (et autres raisons) ce projet n’a jamais vu le jour. Le concept n’ayant pas réussi, il a isolé deux parties intéressantes de son projet de jeux-vidéos : le chat interne et le partage de photos. En se focalisant sur le meilleur de sa première idée, il a réussi à pivoter et créer des outils devenus des incontournables.

Si cette structure est pourtant la plus utilisée, c’est parce qu’elle permet un suivi facile et génère un très grand nombre d’idées grâce au sourcing et l’appel à projets. Il y a en effet une forte communication autour du lancement de ce nouveau programme (informations internes, processus de recrutement des intrapreneurs… ) et c’est le plus simple à mettre en place si vous n’avez jamais lancé de programme et de stimulation de l’innovation. D’ailleurs, si vous avez recours à ce programme mais qu’il ne vous offre pas les résultats que vous espérez, nous vous conseillons notre conférence sur l’échec des programmes d’intrapreneuriat. Elle reprend toutes les erreurs à ne pas faire et vous offre de précieux conseils facilement activables.

Le programme continu

Plus destiné aux habitués des programmes d’innovation, il s’adresse aux entreprises où les métiers sont bien sensibilisés à l’intérêt des démarches d’innovation, et avec un processus bien huilé. Il fonctionne de la manière suivante : les directions métiers et collaborateurs peuvent proposer en continu des projets d’innovation. Chaque projet démarre indépendamment des autres et avance selon son propre rythme.

L’accompagnement est lui aussi effectué en continu : les équipes innovation proposent (conjointement) un processus structuré d’accompagnement des projets. (Exploration/PMF/ Industrialisation). C’est un comité d’innovation qui se réunit tous les X mois pour décider de la suite des projets : continuer, pivoter, tuer. Contrairement au programme cadré, ici, il y a une marge d’itération pour les projets qui ont plus de temps pour valider leur marché et pivoter si nécessaire. Cependant, il est aussi plus complexe à gérer et beaucoup d’entreprises manquent de structures pour apporter aux différents projets l’accompagnement nécessaire. En ne maitrisant pas la méthode d’accompagnement des projets, les décisions sont souvent prises sur des ressentis, moins que sur des données et choix précis et elles manquent de ressources : budget, connaissance marché, temps…

De plus, comme les projets sont lancés selon les problématiques des différentes business units, il n’y a aucun appel à projet qui, rappelons-le, est généralement l’opportunité de créer de nombreuses bonnes idées !

Recadrons ces pratiques

Ces programmes sont très bien, et avec un bon accompagnement, ils permettent la stimulation et le lancement d’une culture d’innovation, avec parfois la sortie de beaux projets. Mais il est temps de secouer un peu la méthode et de l’améliorer.
On a d’un côté : un programme facile à gérer, qui génère de nombreuses idées mais permet peu de pivot. (programme cadré)
De l’autre côté : un programme qui laisse une forte marge d’itération des projets mais est complexe à gérer et ne produit pas assez d’idées (programme en continu).

Si on prenait le meilleur des 2 pour créer un programme adapté à chaque entreprise ?

À croire que nous avons oublié une des leçons les plus importantes de l’innovation : fail fast / fail often, rate vite et rate souvent. L’itération est la clé.
Il faudrait un programme permettant aux entreprises de continuer à créer de la valeur grâce à une méthode plus flexible offrant plus de temps pour la phase d’exploration (#Slow innovation) tout en gardant une forte communication autour du programme. Pour générer un grand nombre d’idées, toutes les business units doivent être en connaissance du programme.

Ainsi, toutes les organisations pourraient mettre en place des programmes d’innovation quels que soient leurs objectifs. Ce nouveau modèle offre une réponse aux différentes limites présentées plus haut.

Réflexion STFU : Le Programme ouvert, ça fonctionne comment ?

Premièrement, il s’agit de ne pas écrémer trop rapidement les projets, mais de leur laisser une chance d’itérer une nouvelle fois et d’aller plus en profondeur dans la phase d’exploration (cf notre article slow innovation, où on vous explique pourquoi c’est important de ralentir son innovation dans certaines phases)

On prendrait la même structure de lancement qu’un programme cadré et la gouvernance du programme en continu pour créer un nouveau programme hybride ce qui permettrait à la fois de sourcer un grand nombre de projets et stimuler l’innovation, tout en laissant le temps au projet d’itérer pendant les phases d’exploration, PMF, industrialisation..

Ce programme s’adresse aux entreprises qui souhaitent mettre en place des programmes d’innovation continue mais qui ne savent pas comment passer le cap.

Pourquoi c’est bien

En donnant plus de temps aux équipes dans ces phases, l’entreprise obtiendra enfin des projets viables à forte création de valeur.

  • Un meilleur sourcing grâce à une forte communication du programme
  • Plus de temps pour la phase d’exploration et valider le marché = une meilleure compréhension du besoin et la mise en place d’un projet répondant aux problématiques de son marché.
  • Plus de temps pour cadrer l’atterrissage = Un projet qui se structure dans une business units et se pérennise

Attention, nous ne sommes pas en train de dire qu’il faut pivoter à l’infini. Le pivot doit avoir lieu seulement s’il répond à une problématique découverte et qu’on a la preuve substantielle qu’il est nécessaire. (nouvelles informations lors des interviews utilisateurs par exemple).