Plus aucune réponse aux mails, aux appels ou aux SMS : le « ghosting », qui touchait jusqu’alors les relations amoureuses, se répand désormais dans la sphère du recrutement. Du jour au lendemain, après quelques entretiens, le candidat disparaît soudain des radars, plongeant le recruteur dans la stupéfaction. Éconduit sans la moindre explication, celui-ci est « largué » avant même d’avoir entamé la moindre collaboration sérieuse. Une pratique qui lui fait perdre un temps précieux et doit l’amener à revoir son process de recrutement pour éviter cette situation. 

Des candidats de plus en plus nombreux à jouer les fantômes

Dans certains cas, c’est le jour même de la prise de poste que la personne recrutée ne donne plus signe de vie, alors même que le contrat a été signé. Pour l’employeur qui croyait tenir la perle rare, la déconvenue est immense : il doit redémarrer de zéro son processus de recrutement en espérant ne pas subir une nouvelle déception.  Dès 2019, 83 % des recruteurs américains avouaient ainsi s’être déjà fait « ghoster »1. Un phénomène qui n’est donc pas totalement nouveau, mais qui s’accélère, gagnant désormais l’Europe et touchant un nombre toujours plus large de secteurs : non seulement l’hôtellerie et la tech, où la forte pénurie de candidats favorise ce genre de pratiques, mais aussi les secteurs qui emploient des cadres, en particulier les profils experts très convoités.

Serait-ce simplement un juste retour de bâton, pour les recruteurs, quand ces derniers pratiquent eux-mêmes trop souvent le ghosting, en omettant de répondre systématiquement à chaque candidature ? Ou bien, s’agit-il d’un malaise plus profond ? Il n’empêche, force est de constater que cette pratique n’est plus seulement anecdotique !

Des candidats en position de force, qui prennent la main sur le recrutement

Cette tendance, comme bon nombre des évolutions actuelles dans le monde du travail, a été accélérée par la pandémie. La période post-Covid a en effet vu certaines offres d’emploi exploser, dans un contexte doublement marqué par la croissance et le phénomène de grande démission. Dans les secteurs en tensions, les candidats ont désormais le choix entre 3 ou 4 propositions. En position de force, ils ne prennent plus le temps de décliner une offre qui les intéresse moins, ou n’osent pas toujours prévenir, lorsqu’ils décident de couper court en plein milieu d’un recrutement, préférant tout simplement ne pas se présenter à l’entretien.

La généralisation d’une première prise de contact en visio-conférence facilite ces disparitions soudaines. L’absence de relation humaine, physique, incite en effet moins les candidats à se projeter. La génération des millenials, habituée au zapping, mais aussi beaucoup plus exigeante que son aînée en matière de sens et de conditions de travail, est particulièrement coutumière du fait.

Autre élément, qui favorise le ghosting : le temps, trop long, du recrutement. 11 semaines en moyenne pour un cadre, selon une étude réalisée par l’Apec; un délai inadapté, sur les secteurs en tension !

Tout repenser pour échapper au ghosting !

Pour éviter de se retrouver face à ces candidats fantômes, les recruteurs doivent donc adapter leurs pratiques. En commençant par raccourcir les délais. 60 % des candidats jugent ces derniers trop longs, et attendent une expérience de recrutement modernisée.3 Même si l’engagement ne se concrétise pas, ils désirent également recevoir un feedback de leur prestation. L’entreprise doit donc, à minima, faire preuve de transparence : informer le candidat sur les différentes étapes, et lui donner, à l’issue de chaque entretien, un premier retour, ainsi qu’une idée des délais dans lesquels il obtiendra une réponse.

Une attention particulière doit également être accordée à la description des contours précis du poste. Dans ce domaine, les incompréhensions sont encore trop fréquentes, conduisant inéluctablement à l’échec. La valorisation de la marque-employeur, elle aussi, est essentielle. Elle doit rayonner dès l’offre d’emploi et tout au long des entretiens. Plus le candidat se sentira proche de l’entreprise et connaîtra ses valeurs, moins il sera enclin à passer son chemin. Il ne faut pas non plus hésiter à le présenter à l’équipe qu’il rejoindra, ainsi qu’à lui parler des projets sur lesquels il interviendra pour rendre plus concrète sa venue dans l’entreprise.

Au cours du processus, le recruteur devra aussi être attentif à certains signes, qui peuvent l’alerter sur le risque de « ghosteur » potentiel : un candidat peu investi, tardant trop à répondre aux messages ou changeant sans cesse la date des entretiens, doit impérativement éveiller son attention. En respectant ces principes et en maîtrisant mieux son recrutement, l’entreprise augmentera ses chances de toucher les bons profils, qui répondront à ses attentes, et ne le largueront pas sans même un mot !

1 Étude Indeed, USA, 2019
2 Étude Apec, durée moyenne de recrutement en 2021
3 Étude Greenhouse, 2022 – « What every company needs to know about hiring right now…”
Crédit Depositphotos depositedhar