Une véritable autonomie au travail exige un changement de culture, et pas seulement de la liberté. En tant que professionnels des RH, nous sommes sans cesse exposés aux nouvelles tendances censées stimuler l’engagement et la productivité des employés. Parmi elles, l’autonomie au travail revient souvent, avec ses promesses de flexibilité horaire et de télétravail.

L’observatoire sociétal des entreprises d’IPSOS, qui analyse le rapport au travail de la Génération Z, indique ainsi que 72% des 18-28 ans jugent important ou primordial l’autonomie, la possibilité de prendre des décisions seul et 70% la flexibilité des horaires. Mais soyons honnêtes : se contenter de proposer autonomie et flexibilité ne suffit pas.
La véritable autonomie, celle qui génère réellement des résultats, exige une transformation fondamentale de la culture d’entreprise, un changement que les responsables RH sont particulièrement bien placés pour mener. Il faut avant tout s’attaquer aux facteurs culturels sous-jacents qui déterminent si les employés se sentent habilités à s’approprier leur travail et à prendre des décisions.

L’illusion de la liberté : pourquoi l’autonomie de surface est un leurre

Trop souvent, l’autonomie est traitée comme un simple exercice de conformité. Les entreprises proposent des horaires flexibles, autorisent le télétravail, puis se demandent pourquoi les scores d’engagement n’ont pas explosé.

Le problème ? Les employés ont peut-être la liberté de choisir leurs heures, mais s’ils se sentent toujours micro-managés, manquent des ressources nécessaires pour prendre des décisions de manière indépendante ou craignent les conséquences d’une erreur de jugement voire d’un échec, ils seront in fine empêchés dans leur prise d’indépendance. Cette “autonomie de surface” aligne tous les ingrédients d’une recette menant inévitablement à la frustration et au désengagement.

Construire la confiance et apporter la sécurité psychologique

La véritable autonomie repose sur la confiance. Les managers doivent faire confiance à leurs collaborateurs pour réaliser leur travail, et ces derniers doivent avoir l’assurance qu’ils ne seront pas seuls à assumer la responsabilité de leurs éventuelles erreurs. Cela nécessite un effort conscient pour cultiver une culture de sécurité psychologique, où les employés se sentent à l’aise dans la prise d’initiatives, et les risques qui lui sont associés, dans le fait d’exprimer leurs opinions et d’apprendre de leurs échecs.

Redéfinir la gestion de la performance et investir dans la formation des managers

En tant que responsable RH, il est possible de mener ce changement en redéfinissant la gestion de la performance, en ne se focalisant pas sur des mesures rigides et en adoptant une approche plus holistique qui valorise la créativité, l’attitude adéquate pour la résolution des problèmes et enfin l’initiative. Il est essentiel d’investir dans la formation des managers, en les dotant des compétences nécessaires pour déléguer efficacement, fournir un feedback constructif et favoriser une culture de confiance.

Favoriser la communication ouverte et créer un environnement de sécurité psychologique

Pour favoriser un environnement de travail sain, il est important d’encourager une communication ouverte. Cela passe par la mise en place de canaux où les employés peuvent librement exprimer leurs idées, préoccupations et retours, sans crainte de représailles. Des points réguliers, des enquêtes anonymes et une politique de porte ouverte y contribuent efficacement.
Créer un climat de sécurité psychologique est tout aussi essentiel. Il s’agit d’encourager l’expérimentation, de considérer les erreurs – quand elles arrivent- comme des opportunités d’apprentissage et d’évolution, et de cultiver un état d’esprit où remettre en question le statu quo est accepté.

Des politiques d’entreprise qui soutiennent l’autonomie

Les politiques de l’entreprise doivent favoriser l’autonomie plutôt que de l’entraver. Cela inclut aussi bien les politiques de remboursement des dépenses que les processus de prise de décision. Enfin, il faut tirer parti des technologies RH, et utiliser des logiciels pour rationaliser les processus, automatiser les tâches et fournir aux employés les outils dont ils ont besoin pour gérer efficacement leur travail.

Ce changement culturel ne consiste pas seulement à faire en sorte que les employés se sentent bien. Les études montrent que les organisations avec des niveaux élevés d’autonomie connaissent une augmentation de la productivité, de l’innovation et de la fidélisation des employés. Les “récompenses” immatérielles jouent en effet un rôle essentiel dans la productivité et la satisfaction au travail. Cependant, étant donné la difficulté à les quantifier, les entreprises ont toujours privilégié les politiques de rémunération et d’avantages pour attirer, motiver et retenir leurs collaborateurs. La confiance et l’autonomie s’inscrivent au nombre des récompenses immatérielles perçues.

Mesurer et améliorer l’engagement et l’autonomie

Il est essentiel de suivre et de mesurer l’engagement des employés, d’identifier les lacunes en matière d’autonomie et de mettre en place des actions correctives ciblées. De plus, la technologie peut jouer un rôle clé en facilitant la communication et la collaboration, en connectant les employés aux ressources et au soutien nécessaires à leur réussite.

Elle offre surtout la possibilité d’automatiser les tâches administratives, libérant ainsi du temps aux managers pour qu’ils se consacrent au coaching et au mentorat de leurs équipes, tout en accompagnant leurs collaborateurs dans l’acquisition des compétences indispensables à leur épanouissement dans des rôles autonomes. Les responsables RH ont la responsabilité de mener cette transformation, de créer des cultures d’entreprise où les employés se sentent autorisés à s’approprier leur travail, à prendre des décisions et à donner le meilleur d’eux-mêmes. Il est temps de dépasser les avantages purement formels et de se concentrer sur la construction d’une base solide de confiance, de sécurité psychologique et de communication ouverte. Les résultats ne manqueront pas de se faire sentir.
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