Ingénieur en informatique et ancien officier de Gendarmerie, Grégoire Leclercq est devenu auto-entrepreneur en créant une structure de conseil en maîtrise d’œuvre d’ouvrages informatiques. Il a fondé en décembre 2009 la Fédération des auto-entrepreneurs (FEDAE), qu’il préside depuis et qui compte 62 000 adhérents. A la pointe du combat contre la loi Pinel, il fait le point dans cette interview exclusive sur le régime de l’auto-entrepreneur et apporte son soutien à l’APCE (Agence pour la création d’entreprises) menacée de disparition (ndlr : un conseil d’administration doit se tenir le 29 avril prochain pour décider de son sort, voir à ce sujet l’interview exclusive de Frédérique Clavel, présidente de l’APCE).

Y a t-il eu des changements apportés par le Sénat à la loi Pinel ?

La loi a été discutée au Sénat les 17 et 18 avril derniers et peu de changements significatifs ont eu lieu par rapport au texte adopté en février par l’Assemblée nationale. Nous avons obtenu une clarification par rapport à un amendement exigeant un stage de 5 jours préalable pour s’installer comme artisan. Ce ne sont plus seulement les chambres de métiers qui pourront proposer ces stages, mais tous les organismes qui seront agréés : nous allons faire en sorte que le maximum d’organismes soient inscrits pour éviter les blocages. Nous avons aussi obtenu que l’obligation de suivre une formation pour changer de régime quand l’auto-entrepreneur franchit le seuil de la moitié du chiffre d’affaires autorisé soit transformée en préconisation.

La prochaine étape est le passage du texte en commission mixte paritaire, mais peu de changements devraient intervenir en ce qui concerne le régime de l’auto-entrepreneuriat. Pour moi cette loi c’est surtout beaucoup de bruit pour rien. Le régime de l’auto-entrepreneur en sort maintenu et même renforcé (le terme d’auto-entrepreneur n’est pas inscrit dans la loi). Selon moi, ce régime, qui est essentiel pour stimuler la création d’entreprises, ne devrait pas changer d’ici 4 à 5 ans.

Quels sont les prochains combats de la FEDAE ?

Nous avons deux épineux dossiers à traiter : celui sur les cotisations retraite qui ne sont pas versées par la CIPAV aux auto-entrepreneurs alors que ceux-ci ont cotisé et le paiement de la CFE (cotisation foncière des entreprises). Pour la CIPAV, nous voulons les rencontrer pour exiger qu’ils appliquent les recommandations de la Cour des comptes : 250 000 auto-entrepreneurs sont spoliés par cette caisse de retraite. Nous avons également intenté une action en justice contre le président de la CIPAV qui nous a insulté dans L’Express.

Concernant la CFE, les auto-entrepreneurs, qui étaient jusqu’alors exonérés de cette taxe, vont devoir désormais la payer sur une base forfaitaire (500 euros pour un chiffre d’affaires de 0 à 10 000 euros et 2 000 euros pour un chiffre d’affaires de 10 000 à 32 000 euros). Nous allons nous battre pour changer ce mode de calcul et faire en sorte d’appliquer un pourcentage de 2% par rapport au CA. Si ce changement n’est pas adopté dans la loi de finances, la CFE risque de tuer beaucoup d’auto-entrepreneurs.

Pourquoi êtes vous monté au créneau pour défendre l’APCE ?

Nous avons été les seuls à défendre cette agence qui a l’énorme mérite de donner des conseils gratuits et très efficaces pour créer une entreprise. Pourquoi vouloir détruire quelque chose qui fonctionne ? (le gouvernement lui a coupé les vivres en 2013 dans l’objectif de la reformater). Son site internet – dont la mise à jour demande des ressources – regorge d’une multitude d’informations qui aide le créateur ou repreneur dans sa démarche et s’avère un passage obligé. Son audience est identique au site internet du ministère de la Défense (800 000 visiteurs uniques par mois). La subvention de l’Etat (2,7 millions d’euros sur un budget total de 6,4 millions en 2013) apparaît comme négligeable par rapport aux résultats (550 000 entreprises sont créées chaque année en France, un record !). Nous demandons à ce que l’APCE puisse voir l’ensemble de ses missions reprécisées et que l’Etat ne se désengage pas, qu’elle obtienne les moyens humains et financiers de réaliser sa mutation sur 3 années et que ses missions de coordination des réseaux soient précisées et respectées.

(Propos recueillis par Sophie Lhameen)




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Sophie Lhameen
Sophie Lhameen, journaliste multimédia (web et print), a travaillé pendant 15 ans comme journaliste spécialisée sur l'Afrique avant de devenir en 2008, rédactrice en chef adjointe du magazine Le MOCI (Moniteur du commerce international) jusqu'en janvier 2013. Ses centres d'intérêt : l'entreprise, le management, les ressources humaines, l'emploi, l'économie, l'intelligence économique et de l'international. Google+