Née en Belgique en 1951, ses premières sensibilités vont vers la chimie dont elle obtient une licence avant de valider un diplôme à l’Institut supérieur d’urbanisme et de rénovation urbaine, pour entamer  sa carrière à la direction de l’architecture du ministère belge dédié à l’environnement et au cadre de vie.

Intuitive, Françoise Nyssen déniche trois Goncourt et deux prix Nobel

Mais celle qui « trouvait plus facile de faire des études de sciences plutôt que des études de lettres » n’a pas résisté à l’appel du Livre. « La lecture était, enfant, plus qu’un passe-temps : ma nourriture favorite », aime-t-elle à répéter. Passionnée, elle rejoint son père Hubert Nyssen chez Actes Sud, la maison d’édition qu’il  a fondée à Arles et en devient codirectrice en 1987. « Actes Sud a joué un grand rôle, en montrant que la littérature n’était pas française, mais internationale », explique Hubert Nyssen, aujourd’hui décédé, dans une interview donnée à L’Obs en 2008. Françoise Nyssen donne  le ton et avec intuition repère et édite des auteurs dont trois deviennent des Prix  Goncourt (Laurent Gaudé, Jérôme Ferrari et Mathias Enard), deux Nobels de littérature (Imre Kertész et Svetlana Alexievitch) et d’autres, ouvrages à succès (comme Le Charme discret de l’intestin, par exemple ou les livres de Paul Auster).  Elle se révèle aussi femme d’affaires, à son initiative Actes Sud rachète les éditions Le Rouergue, Jacqueline Chambon, Sindbad ou encore Payot & Rivages en 2013, le dernier en date, auxquelles elle laisse une totale indépendance malgré sa participation financière majoritaire au capital.

Le Domaine du Possible pour offrir une meilleure scolarité aux enfants

Mais en 2012, son fils Antoine, « un être particulier, précoce, dyslexique, passionné de tout, bouillonnant », comme elle le décrit, met fin à ses jours à l’âge de 18 ans. L’événement provoquant  le déclic, avec l’aide de son mari, elle décide de se battre contre les lacunes du système scolaire actuel. Ensemble, ils retapent une ferme arlésienne et y ouvrent une école, baptisée le Domaine du Possible, qui prodigue un enseignement adapté à la sensibilité de chaque enfant. « Inculquer un savoir comme avec un entonnoir, presque un chausse-pied » explique joliment Françoise. « On pourrait organiser une course de fond et on prendrait les derniers ? », se demande-t-elle lorsqu’elle réfléchit à un moyen juste de sélectionner les élèves qui intègreront le Domaine du Possible.
L’initiative est applaudie, mais certains dénoncent le discours qui se cache derrière la pédagogie servie aux enfants du Domaine du Possible. L’école revendiquerait les théories de Pierre Rabhi, essayiste et agriculteur, fondateur du mouvement Colibris, dont les propos ne font pas l’unanimité. L’école fait aussi partie du réseau Steiner-Waldorf, dont la vision a été remise en cause à plusieurs reprises.

Une entrée en politique à l’âge de 66 ans

Que l’on soit pour ou contre l’initiative du Domaine du Possible, Françoise Nyssen n’en reste pas moins une grande femme, brillante et impliquée. Elle organise depuis toujours expositions, ateliers de lecture, concerts en tout genre et promeut la culture pour tous, accessible à tous. Elle reçoit le prix Veuve Clicquot de la femme d’affaires de l’année en 1991, Officière de la Légion d’honneur, Commandeure de l’Ordre national du Mérite et Commandeure de l’Ordre des Arts et des Lettres, à 66 ans, Françoise Nyssen fait son entrée en politique, par la grande porte.