Alors que le phénomène de « la grande démission » s’étend outre-Atlantique, certains s’inquiètent que celui-ci ne finisse par gagner nos rivages. Il y a en réalité peu de chance que cela se produise. Certes, les confinements successifs ont été l’occasion pour certains Français de repenser la place du travail dans leur vie, mais peu ont finalement sauté le pas d’une reconversion totale. En revanche, d’autres phénomènes viennent perturber l’engagement des collaborateurs, que les entreprises doivent prendre en compte si elles ne veulent pas voir leurs talents partir à la concurrence.

France-USA : un rapport au travail aux antipodes

La grande démission est un phénomène très “américain”. Dans ce pays où la protection sociale est quasi-inexistante et où l’on peut être “débarqué” de son emploi du jour au lendemain avec pour seul filet de sécurité ses propres économies, les salariés ont appris à se réorienter très rapidement. Les démissions massives constatées depuis août dernier sont donc culturellement explicables. Les Français, en revanche, craignent bien plus l’incertitude, à laquelle ils sont peu habitués.

Certes, quelques-uns, épuisés par les confinements, ont décidé de tout plaquer pour réinventer leur vie autour de leur passion, mais ils représentent une proportion infinitésimale. En réalité, la plupart ont simplement profité des aides d’État, notamment du chômage partiel, et patiemment attendu des jours meilleurs pour reprendre leur activité. Pour autant, la crise a fait émerger de nouvelles aspirations, que les entreprises doivent prendre en compte au risque de voir leurs talents partir à la concurrence.

Prendre du recul pour conforter ses choix

Parmi ces tendances, on trouve la notion de “break”, qui existait déjà avant la crise mais de façon beaucoup plus marginale. Désormais, il n’est pas rare que des collaborateurs décident subitement d’éteindre leur ordinateur et de prendre un congé sabbatique. Leur volonté n’est pas forcément de réorienter leur carrière ou d’en changer, mais plutôt de prendre du recul sur la voie qu’ils ont empruntée. Après plusieurs années d’études, suivies de 5 à 6 ans de travail, ils souhaitent s’assurer que leur choix professionnel correspond bien à leurs aspirations profondes.

Il s’agit là d’un phénomène générationnel, qui touche principalement les Millennials. C’est toutefois un réel sujet pour les entreprises, qui ont pris du temps et engagé des ressources pour former ces jeunes actifs et les rendre véritablement opérationnels. Or, du jour au lendemain, les voici qui prennent la poudre d’escampette. Certains reviendront, quand d’autres en profiteront pour changer d’entreprise ou se lancer dans l’entreprenariat, une autre tendance qui prend de l’ampleur en France. L’envie d’entreprendre s’accorde avec le besoin d’autonomie et la quête de sens renforcés par la crise.

Inscrire son entreprise dans une nouvelle réalité

Ces phénomènes, qui perturbent la bonne marche de l’entreprise, se doublent, dans les métiers de la Tech et du Digital, d’une forte pénurie de candidats. Pour attirer les talents, les entreprises vont donc devoir travailler leur image. Être perçue comme une société leader sur son marché ne suffit plus à convaincre et à attirer, désormais, les solutions proposées doivent apporter quelque chose de positif au monde, les services être réellement satisfaisants à l’usage, mais surtout les valeurs prônées sur le papier être incarnées au quotidien, aussi bien pour les clients que pour les collaborateurs.
Transparence, feedback, autonomie, respect, diversité et inclusion deviennent ainsi les nouveaux mantras du management en 2022. Si l’entreprise parvient à les traduire dans les actes, les salariés se sentiront investis dans la réussite de leur entreprise.

Les talents d’aujourd’hui veulent évoluer dans des environnements ouverts, qui les portent et leur permettent de progresser professionnellement, mais aussi de s’épanouir personnellement. Cette démarche, il faut l’encourager et l’entretenir au quotidien, via une culture d’entreprise qui valorise, rassure, soutient et félicite. Sans cette prise de conscience, les désertions seront nombreuses, non pas pour aller faire de la permaculture dans la Creuse, mais pour rejoindre la concurrence!