Pour faire face aux nouveaux défis et à la rareté de certaines compétences les entreprises  ont grand intérêt à mieux mobiliser leurs propres ressources.

1 – Les avantages du reskilling

La digitalisation de tous les métiers, la globalisation des marchés accompagnée aujourd’hui d’une tendance à la relocalisation, la transition énergétique… tout pousse les entreprises à se réinventer. Pour cela, elles doivent disposer de compétences nouvelles.
La tentation est grande d’aller chercher à l’extérieur les nouveaux talents nécessaires…

A priori plus simple, plus rapide et moins coûteuse, cette option peut se révéler dans la pratique moins performante qu’il n’y paraît. Certaines compétences se font rares sur le marché de l’emploi. Il faut souvent aller chasser les talents dans les entreprises concurrentes, mettre des budgets conséquents sur la table et accepter des délais prolongés.  Une fois trouvés et disponibles, les nouveaux arrivants devront prendre le temps de s’acculturer à leur nouvel environnement avant d’être pleinement opérationnels.

2 – Les plans de Reskilling et Upskilling d’Amazon, Google…

Peut-être un signe des temps, les entreprises du nouveau monde  mettent  en place de vastes plans de Reskilling et Upskilling.  Ne faut-il pas y voir une évolution des operating models RH ?
Ces entreprises commencent par mener un projet de Strategic Workforce Planning en associant les opérationnels à une analyse conjointe de l’évolution des postes de travail et des besoins d’adaptation des compétences de leurs collaborateurs.
Cet inventaire, s’il est partagé par tous les échelons de l’organisation est en lui-même un exercice de mobilisation collective sur la raison d’être de l’entreprise et sur ses besoins d’adaptation, d’autant que l’on constate une part grandissante des soft skills dans les profils recherchés.   En outre, ces projets sont souvent l’occasion de nourrir le dialogue social avec des sujets sur lesquels les intérêts des différentes parties arrivent à converger.

Pour simplifier la tâche qui peut s’avérer ardue, des priorités peuvent être définies afin de ne « scanner » que les postes ou les secteurs les plus critiques pour la transformation de l’entreprise ou ceux qui sont en tension sur le marché de l’emploi.

3 – Les objectifs des programmes de reskilling

L’enjeu est ensuite d’articuler efficacement les différentes options que sont les mobilités internes, les formations et en dernier lieu les recrutements externes. La mise en œuvre des programmes de reskilling mérite une attention particulière. A la différence des plans ce formation classiques ils répondent à un objectif collectif précis qui vise à acquérir des compétences opérationnelles sur des postes identifiés. Ces programmes seront très souvent déployés in situ, sous forme d’alternance ce qui n’exclut pas des partenariats avec des centres de formation, des Ecoles ou des Universités. Tous les outils de formation on line peuvent aussi être mobilisés, d’autant que la crise sanitaire a accéléré leur mise en place et amélioré leur perception.

Cette approche holistique qui associe les plans de Talent Acquisition, les plans de développement professionnel et de mobilités internes et les plans de formation méritent un leadership dédié. La création au plus haut niveau de l’organisation d’un poste de Chief Skills and Learning Officer peut constituer un signal fort  et ainsi un  atout pour une bonne  mise en œuvre.

Reskilling, upskilling, cross-skilling : les définitions

Le Reskilling : définition

Reskilling signifie requalification. Il s’agit d’une stratégie de formation professionnelle. Elle consiste à embaucher un collaborateur, principalement sur la base de ses softs skills ; les soft skills étant le savoir-être, le relationnel, l’adhésion à la culture de l’entreprise. Le collaborateur est donc embauché par l’entreprise en vue d’être formé aux hard skills, c’est-à-dire aux compétences techniques nécessaires à l’exécution du poste.
En clair, le reskilling se base sur le potentiel d’un collaborateur à développer des compétences spécifiques, et non sur ses compétences à l’instant T.

Le reskilling intervient lors des recrutements externes : recrutement pour un contrat de travail, un contrat d’apprentissage ou un contrat de professionnalisation. Le reskilling peut aussi consister à former un collaborateur disposant d’une certaine ancienneté pour l’amener à un changement de métier tout en le maintenant dans l’entreprise. Cette évolution professionnelle intervient souvent pour les collaborateurs exerçants des postes obsolètes ou pour des collaborateurs désireux de changer de métier pour se challenger. Le reskilling est une manière de fidéliser les collaborateurs en leur proposant d’autres perspectives d’évolution de carrière.

L’upskilling : définition

L’upskilling est une stratégie de formation professionnelle reposant sur des éléments plus classiques. L’upskilling consiste à faire évoluer des compétences déjà existantes chez un collaborateur (ses hard skills). De fait, l’upskilling représente une stratégie d’évolution de carrière plus linéaire où le collaborateur développe l’existant ou monte en responsabilité sur un poste qu’il connaît : passage de technicien à manager d’équipe, approfondissement des acquis, développement des compétences techniques…

Le cross-skilling : définition

Le cross-skilling consiste à former des collaborateurs à des tâches annexes sortant du cadre de leur mission habituelle. Le cross-skilling permet aux salariés de « toucher » d’autres missions tout en maintenant leur poste et leur niveau de compétences sur leur métier historique.

Le cross-skilling permet de challenger les collaborateurs tout en développant la culture d’entreprise (meilleure interaction entre différents services et métiers, meilleure compréhension des enjeux des autres salariés). De plus, pour l’entreprise, disposer de profils polyvalents et adaptables est un atout : la démarche permet une plus grande flexibilité dans la gestion des ressources humaines.

Prérequis pour pratiquer l’upskilling ou le reskilling

Upskilling et reskilling nécessitent de la part du secteur des ressources humaines :

  • La confrontation entre les plans de recrutement externes et les plans d’évolution de carrière en interne
  • Une forte connaissance des soft skills des collaborateurs (en ce qui concerne le reskilling)
  • Une forte connaissance des envies des collaborateurs en termes d’évolution de carrière
  • La mise en place de plans de formation en interne (animés par des collaborateurs de l’entreprise ou par un organisme externe de la formation professionnelle).

Mais aussi plus globalement :

  • Une volonté de conduite du changement
  • Une stratégie d’entreprise incluant une politique de formation

De nombreuses entreprises appliquent ces stratégies sans le savoir

Si les géants de la Tech’ emploient ces termes nouveaux et presque barbares que sont le reskilling, l’upskilling ou le cross-skilling, les stratégies qui se cachent derrière ces notions sont pratiquées depuis longtemps – souvent de manière informelle – par les responsables de la gestion des ressources humaines (direction des ressources humaines, management des ressources humaines, service de développement RH, etc.).
Le reskilling – plus particulièrement – intervient depuis plusieurs années dans le cadre des mutations du travail liées à la digitalisation des entreprises. Les besoins accrus de personnel dans les métiers du marketing digital poussent les organisations à revoir leurs plans de formation et les évolutions de carrière de leurs collaborateurs, tout en déployant des processus de recrutement pour faire venir des talents neufs.

La digitalisation des entreprises a entraîné, de la part du management des ressources humaines, une véritable gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, avec une mise en pratique concrète des concepts de reskilling et upskilling. Ceux-ci sont désormais pratiqués par de nombreuses organisations : des grandes entreprises, mais aussi des PME.
Enfin, de nombreuses entreprises développent des politiques de formation interne dédiées à l’exercice de nouveaux métiers dans une optique de soigner leur marque employeur : les jeunes actifs étant plus volatils et désireux de changer de trajectoire que les anciennes générations.




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Loïc Mahé, Senior Advisor Oneida
Loïc Mahé débute sa carrière en 1980 au sein de THOMSON-CSF, futur Thales, à la Direction du Personnel et des Affaires Sociales, puis comme Responsable des Ressources Humaines d’un site industriel, et Responsable du Développement professionnel de la branche Equipements Aéronautiques. En 1988, il devient DRH de la Division Télécommunications jusqu’en 1993. Nommé DRH de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris, il rejoint en 1998 la Société Guilbert (Groupe PPR) comme Directeur des Ressources Humaines et de la Communication. En 2001, il réintégré le Groupe Thales, comme DRH du « Business Group » Communication, il devient DRH du Groupe Thales (68 000 personnes) en mai 2010. En juillet 2013, il prend la responsabilité de l’ingénierie et de l’Innovation de l’AFPA (Association pour la Formation Professionnelle des Adultes). Début 2014, il rejoint Sanofi pour prendre en charge la direction des Ressources Humaines des Affaires Industrielles (45000 employés, une centaine de sites dans 35 pays).