2020 s’ouvre telle une année de transition pour les entreprises françaises, en particulier pour les TPE-PME. Décryptage par par Antoine Sentis, Directeur Marketing et Communication du Groupe EBP

Leur situation économique et financière s’est améliorée et les ratios comptables publiés par la Banque de France permettent d’apprécier une situation plutôt positive[1]. Ceci d’autant plus que l’accès au crédit bancaire est plus aisé.
Par ailleurs, le déficit du commerce extérieur s’est stabilisé ces derniers mois, après la nette dégradation enregistrée l’été dernier[2]. Aussi, le climat des affaires qui se dessine devrait être favorable dans les douze mois à venir même si les TPE-PME devront faire preuve de vigilance sur 3 points.
Tout d’abord, la question des délais de paiement entre entreprises et le contexte mondial, qui appellent un renforcement des compétences financières des dirigeants. Ensuite, la transformation numérique et la prise en compte des questions environnementales. Enfin, le point capital : les évolutions réglementaires nombreuses à intégrer, issues de la législation française.

La baisse de la fiscalité

En effet, de nombreux changements s’opèrent dans le champ des règles applicables aux entreprises depuis le 1er janvier : poursuite de la baisse de l’impôt sur les sociétés, modification du seuil pour passer un marché public sans formalités, facturation électronique pour les TPE…Elles demandent une adaptation et une agilité pour les intégrer mais aussi des anticipations en matière de gestion sociale et financière. Particulièrement, la Loi de Finances 2020 qui présente à la fois des avantages, mais aussi des zones de difficultés.

Tout d’abord, en matière fiscale, la baisse de l’impôt sur les sociétés (IS) pour 2020, devrait être de nature à dégager des marges de pilotage. Pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 250 millions d’euros, le taux normal de l’IS est ramené à 28 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2020. Pour les grandes entreprises dont le chiffre d’affaires est égal ou supérieur à 250 millions d’euros, l’IS sera au taux de 28% jusqu’à 500 000 euros de bénéfice. Au-delà, le taux normal de 31 % s’appliquera. Des dispositions applicables là aussi pour les exercices ouverts du 1er janvier au 31 décembre 2020.

Un pilotage social plus complexe

Sur le plan social, le volet s’annonce très large en matière d’adaptations, pour ne pas dire complexe. Tout d’abord, l’incitation les entreprises à proposer des CDI ou des CDD longs, plutôt que des contrats très courts, un système de bonus-malus est mis en place pour les entreprises de plus de 11 salariés, dans 7 secteurs, dans un premier temps (transports, entreposage, hébergement et restauration, travail du bois, industries du papier et l’imprimerie).[3]

Plus le nombre de salariés qui s’inscrivent à Pôle emploi, après avoir travaillé pour une entreprise, est important par rapport à son effectif, plus elle paiera de cotisations employeur à l’assurance chômage ; plus ce nombre est faible, moins elle paiera de cotisations.Si la première modulation des contributions au titre du bonus-malus ne s’appliquera qu’à compter du 1er mars 2021, la période de référence prise en compte pour calculer cette première contribution, est celle du 1er janvier au 31 décembre 2020. En outre, les CDD d’usage se voient appliquer une taxe forfaitaire de 10 € pour limiter l’usage de contrats très courts.

Par ailleurs, une simplification du recouvrement des cotisations sociales devrait intervenir. La Loi de Financement de la Sécurité Sociale (LFSS) pour 2020 simplifie le dispositif. Aussi, dès 2025, les URSSAF se verront transférer le recouvrement de toutes les cotisations et contributions sociales (en dehors des salariés agricoles).

Sur  le plan des ressources humaines et de la gouvernance, les seuils d’effectifs des entreprises ont évolué. Ils  sont regroupés sur 3 niveaux : 11, 50, 250 salariés. La parité femmes/hommes dans les organes de directions des entreprises de plus  250 salariés est imposée, avec au moins 40 % de femmes dans leur Conseil d’administration ou de surveillance.[4]

Accéder plus facilement aux marchés

Ces mesures supplémentaires, introduites par la Loi PACTE, sont aussi complétées de nouvelles dispositions  en matière de pilotage et de gestion. Ainsi, le plafond des marchés publics sans formalité passe de 25 000 à 40 000 € HT. L’objectif est de permettre à un plus grand nombre de TPE de participer à des marchés publics. En contrepartie, la facture dématérialisée dans le cadre des marchés publics déjà  obligatoire pour les grandes entreprises et les PME, s’applique désormais aux TPE.

Enfin, l’immatriculation au Répertoire des métiers est élargie. Pourront s’y immatriculer, les personnes physiques et les personnes morales qui emploient au moins 11 salariés et moins de 100 salariés (contre moins de 50 salariés) avant le 1er janvier 2020 et qui reprennent un fond précédemment exploité par une personne immatriculée. Les tarifs applicables aux formalités d’immatriculation au Répertoire des métiers seront réduits.

Indépendants et aide à la création

En plus des évolutions du régime de droit commun, les indépendants et micro-entrepreneurs bénéficient désormais d’une sécurité sociale indépendante, confiée à la Sécurité Sociale avec un guichet unique pour chacune de leurs prestations. Enfin, l’ACCRE est modifiée pour les micro-entrepreneurs.

À compter du 1er janvier 2020, ceux qui débutent leur activité pourront continuer de bénéficier d’une exonération de cotisations sociales, mais uniquement pour les 4 premiers trimestres d’activité. Par ailleurs, les micro-entrepreneurs qui débuteront leurs activités à partir du 1er janvier 2020 bénéficieront d’une exonération de 50 % des cotisations sociales (contre 75 % précédemment).

La question de la confiance

L’ensemble de ses évolutions va demander beaucoup d’adaptations aux entreprises françaises. Si les mesures fiscales de baisse l’IR sont plutôt positives, elles attendent pour la suite une stabilité pour une meilleure visibilité. Mais aussi une législation moins galopante dans son ensemble. Demeure une question essentielle : celle de la confiance en notre pays.

Le baromètre mensuel du moral économique des Français publié par Odoxa ce 9  janvier révèle que  77% de défiance en l’avenir en ce début d’année. 53% de nos concitoyens pensent que 2020 sera une année de plus grandes “difficultés économiques”. Ils revendiquent par ailleurs une baisse des impôts, une hausse de leur pouvoir d’achat et souhaitent une croissance plus forte. Par ailleurs, les Français exigent l’arrêt de la grève et le retrait de l’âge pivot[5]. Il est désormais temps pour les pouvoirs publics de reprendre la main pour permettre à nos entreprises de performer en 2020 et pour nos concitoyens, de renouer avec la confiance en notre économie nationale.

[1] Bulletin de la Banque de France n°226 – “Les PME et TPE en France : une situation financière améliorée et un accès au crédit plus facile” – décembre 2019.
[2] Analyse de la direction générale des douanes et droits direct – Novembre 2019.
[3] Source : Loi de Finances 2020
[4] Mesures issues de la Loi PACTE, applicables depuis le 1er janvier 2020
[5] Sondage pour France info, le Figaro et Dentsu-Consulting – 9 janvier 2020