Le tabagisme tue  en France plus de 77000 personnes chaque année et est une charge pour la société.  Les tribunaux sanctionnent un employé indiscipliné ou protègent le cadre victime d’un tabagisme passif du fait de la négligence de l’employeur.

Tabagisme passif contre cadre actif

Une femme non fumeuse atteinte d’un cancer du poumon vient d’être indemnisée grâce à un jugement en appel.  Le tabac est responsable de 73.000 décès par an en France. L’arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux  admet un lien entre un cancer du poumon et l’inhalation au travail de fumée de cigarette. Elle condamne l’École nationale d’architecture de Toulouse (Ensat),». Par son arrêt du 18 décembre 2012, la cour reconnaît que  «le tabagisme passif est à l’origine du cancer bronchique primitif qui est apparu au cours de l’année 2000». La  confirme  une décision du tribunal administratif de Toulouse. Le préjudice «résulte directement de la faute que l’école a commise à partir de 1992 en s’abstenant alors de faire respecter le dispositif antitabac, préjudice qui doit être intégralement réparé». Cette personne non exposée à la fumée dans sa vie privée, la cour condamne  l’Ensat à verser à la requérante 22.320 euros au titre des préjudices subis, multipliant par sept l’indemnité allouée en première instance. Retraitée depuis 2003, la plaignante a subi l’ablation d’un poumon, ce qui fait le prix d’un poumon très faible. Peu de procès en France s’attaquent au tabagisme passif, alors qu’aux États-Unis, les cigarettiers sont régulièrement  condamné à des milliards de dollars.

Obligation de sécurité et de santé de l’employeur

L’employeur est tenu à une obligation de sécurité  à l’égard de ses salariés , il doit faire respecter les dispositions de l’article R 3511-11 du Code de santé publique portant interdiction de fumer dans tous les lieux fermés et couverts qui constituent des lieux de travail. Par conséquent, il est en droit d’user de son pouvoir disciplinaire à l’encontre d’un salarié qui enfreindrait cette interdiction.  A défaut, sa responsabilité peut être mise en jeu (voir notamment, pour un salarié qui avait pris acte de la rupture de son contrat de travail en raison de son exposition au tabac du fait d’une carence de l’employeur, Cass. soc. 6 octobre 2010 n° 09-65.103 : RJS 12/10 n° 940).  Il peut  sanctionner le salarié fautif par un licenciement  dans certaines circonstances.  La cour d’appel de Nîmes considère qu’un salarié ayant déjà fait l’objet d’un avertissement pour avoir fumé une cigarette dans les locaux de l’entreprise, et qui persiste dans ce comportement fautif commet une faute grave. Il met en effet en jeu la responsabilité de l’entreprise en toute connaissance de cause. La cour d’appel de Bourges s’est également prononcée sur la question.  Dans le premier arrêt (n° 10-601), un salarié est licencié pour avoir fumé un cigare alors qu’il circulait sur un chariot. L’intéressé fait valoir que d’autres salariés ayant fumé dans l’enceinte de l’entreprise ont été sanctionnés seulement par une mise à pied. Les juges considèrent que le licenciement est une sanction disproportionnée à la faute, commise par un salarié n’ayant fait l’objet d’aucune mesure disciplinaire en 24 ans d’ancienneté. Dans le second arrêt (n° 10-816), la cour d’appel de Bourges considère que le licenciement d’une salariée ayant fumé une cigarette au point de rassemblement au cours d’un exercice incendie repose sur une cause réelle et sérieuse. Le fait d’avoir allumé une cigarette aurait pu justifier une sanction disciplinaire moindre, mais la salariée avait fait preuve d’insubordination en refusant d’éteindre cette cigarette, malgré les demandes répétées de son supérieur hiérarchique. Source: Editions Francis Lefebvre

Cadre fumeur : il coûte plus cher mais s’arrête plus tôt

Selon une étude de 2005 intitulée “Coût social des drogues”, le tabac coûterait 47,7 milliards d’euro à la société française chaque année soit  3 % du PIB. Le montant de la perte liée au tabac recouvre  les pertes de productivité (entreprises, arrêt maladie/absentéisme) à 18 milliards, les pertes de revenus pour les individus consommateurs ou non à 7,6 milliards, les  soins pour 18, 2 milliards, les pertes de prélèvements obligatoires de 3,7 milliards… Le coût du tabac pour la Sécurité sociale est lourd, le tabac à l’origine de nombreuses maladies cardiovasculaires et de cancers est la 1ère cause de mortalité évitable en France.  Au niveau individuel,  la pause cigarette coûte cher à l’entreprise. Un cadre qui sort 10 fois par jour pour fumer une cigarette grille plus d’une heure et demie  par jour sur son travail,  soit  l’équivalent d’un mois sur un exercice . La productivité en prend un coup. Qui plus est un cadre fumeur est plus souvent malade qu’un non fumeur et s’absente donc plus. Le cadre fumeur coûterait plus cher à l’entreprise, certes il organise son temps comme il veut en synergie avec son service et sa hiérarchie et peut compenser cette perte d’efficacité.   Le tabagisme se concentre de plus en plus dans les milieux défavorisés. Selon les enquêtes de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES), depuis 10 ans  le tabagisme a nettement reculé chez les cadres, peu parmi les ouvriers, et pas du tout parmi les chômeurs. Heureusement les cadres actifs arrêtent de fumer de plus en plus tôt tandis que les chômeurs cadres ou non cadres augmentent leur consommation.  Lire aussi Fumeurs et chômeurs : même combat !