Les nouvelles méthodes de développement personnel peuvent permettre de déverrouiller certains freins intimes qui entravent les femmes dans le milieu professionnel. Réfléchir à la valeur que l’on donne au travail permet de faire sauter les derniers remparts entre les femmes et leur évolution de carrière. Explications.

Depuis 1975, l’année internationale de la femme, la société avance sur la condition féminine et elles ont à présent accès aux mêmes droits que leur pendant masculin. Mais dans le milieu professionnel, même si sur le papier l’égalité existe, dans la pratique, la réalité est beaucoup plus nuancée. De plus en plus de femmes accèdent à des postes clé, et les conseils d’administration des grandes entreprises leur ouvrent leurs portes, cependant cela reste encore la chasse gardée d’un sérail à grande majorité masculine.

De nouvelles normes viennent appuyer l’ascension des femmes en entreprise

En France, depuis la loi Copé-Zimmermann, on exige qu’au moins 40 % de l’effectif des conseils d’administration des entreprises soient des femmes. Dans les entreprises de l’indice SBF 120, les femmes occupent 45,8 % des sièges en 2021 contre seulement 12,5 % en 2010 (avant l’entrée en vigueur de la loi). Mais dans les comités exécutifs français, le déséquilibre demeure : la proportion des femmes chute à 22 % des membres des comités exécutifs des sociétés incluses.
Dans le monde de l’entreprise  l’application généralisée des critères ESG (Environnementaux, sociaux et de gouvernance) poussent fortement à la parité. La prise en compte des critères ESG permet d’insérer des enjeux sociaux et environnementaux dans la gouvernance et la gestion globale de l’entreprise. L’objectif est la valorisation de la performance et de l’image. Plus personne ne souhaite se passer de cette attractivité si accessible.
La porte des entreprises est enfin ouverte aux femmes pour qu’elles prennent la place qui leur revient, alors qu’est-ce qui les freine encore ?

Les femmes moins méritantes ?

On peut se demander donc si les performances professionnelles des femmes sont-elles à mettre en cause ou le malaise est-il bien plus profond et personnel.
Les femmes en rôle de leadership existent bel et bien au sein de l’entreprises, 32.9% des fonctions dirigeantes sont occupées par des femmes en France en 2021, selon Topformation. Une part encore très faible et surprenante puisque l’on sait que lorsqu’il est question de gestion d’entreprise, les femmes performent mieux. Elles réalisent des bénéfices plus importants et connaissent moins d’échecs. Les preuves sont là, les femmes ne déméritent absolument pas.   On peut arriver à se demander si les freins ne sont pas plus personnels ?

Des freins qu’on s’explique mieux…

Selon une étude réalisée par European PWN et Pictet&Cie, elles sont encore 2/3 des femmes cadre supérieur à ne pas oser demander une augmentation salariale ou un avancement dans leur carrière professionnelle.
Pourquoi est-ce si difficile de demander ce qui leur est dû et ce qu’elles ont mis tant de temps à créer ? On ne demande pas une augmentation ou une promotion car on se trouve des excuses dont on ne comprend même pas la raison. C’est en réalité un blocage, dont l’origine est le seul sujet à résoudre pour se lancer.

Les excuses que donnent les femmes s’accumulent tel un inventaire à la Prévert : « je ne suis pas légitime » ; « J’ai déjà été augmentée il y a deux ans » ; « Ce n’est pas mon tour cette année » ; « Ce n’est pas maintenant que l’on demande les augmentations il faut attendre février » ; « Je n’ai pas le pouvoir là-dessus je vais bien voir si mon boss me récompense » ; « La conjoncture est trop mauvaise ».On reconnait ici l’expression du syndrome dit de « l’imposteur », qui est, de manière injustifiée, plus porté par les femmes que par les hommes.

La réalité est bien plus complexe. Le plus souvent les femmes craignent le refus, l’échec et l’inconfort que cela représente. L’inconfort elles connaissent, les femmes portent encore majoritairement la charge mentale du foyer, des enfants, mais aussi la charge émotionnelle professionnelle. Au bureau pour asseoir sa légitimité, il faut ne rien laisser paraitre sous peine d’être accusée d’être une « bonne femme » qui perd le contrôle. Tout ça n’encourage pas à se lancer.
Par conséquent elles se résignent : pas le temps de faire de la politique, d’échanger les off autour d’un drink car il y a la seconde vie domestique qui les attend à la maison. Donc plutôt que de  vendre son travail et parler de sa valeur ajoutée, les femmes travaillent pour laisser des preuves de leur compétence …mais laissent la place aux hommes quand il s’agit de promotion. Or, une piste de résolution pour elles est d’ intégrer que faire de la politique au bureau fait aussi partie du job !

En effet, ne pas participer à faire valoir son parcours professionnel ou retarder le moment où l’on se lance n’a pas simplement qu’un coût financier. Cela coûte également en énergie : ressasser le sujet, voir le temps qui passe, ne pas savoir quoi faire, subir son insatisfaction génère une fatigue émotionnelle importante. Mais le plus grand coût (ou voire coup) est celui porter à la confiance. La conséquence est cruelle, procrastiner alimente les peurs, et altère considérablement le concept que l’on a de soi.

La valeur travail : trouver le juste prix

Le sujet est pourtant simple : demander une augmentation (à son poste actuel ou lors d’un changement d’entreprise), c’est valider que son travail possède une valeur, et que cette valeur s’échange sur le marché à un prix.
Au travail rien n’est personnel ! En effet, les performances professionnelles reposent sur des faits et des résultats. L’estime que l’on a de soi, c’est personnel. Ici, On parle de valeur professionnelle. Cette gymnastique entre un monde et l’autre n’est pas toujours simple mais essentielle pour avoir le détachement nécessaire afin de vivre pleinement son ambition professionnelle. Une carrière ne se fait jamais sur de l’émotionnel.
S’il est si difficile de parler d’argent, c’est aussi parce que cela suppose d’accepter d’être évalué et de se comparer aux autres.  Le rapport que l’on a l’argent peut être compliqué à régler car il est très intime. L’argent est perçu comme une récompense. Cette dernière c’est le pouvoir pour certains, le statut social pour d’autres, et même l’accès à une nouvelle identité « je gagne plus, donc j’ai la preuve que j’existe  ».

Évidement lorsqu’on n’est pas capable d’avoir le même salaire qu’un de ses collègues, les questions d’identité, de valeur, d’estime de soi sont obligatoirement touchées. Mais attention, il ne faut pas se tromper de sujet, le salaire ne reflète pas toujours les compétences.
Après tout, une rémunération n’est rien d’autre qu’un prix fixé par un marché et payée en échange de compétences, de temps, d’intelligence, de savoir-faire, etc. On en revient donc à la séparation qui ne se fait plus entre le personnel et le professionnel. « Si mon travail et mon salaire me donne un statut professionnel, donc je confirme que ce que je gagne est ce que je suis. »

Freud dit que parler d’argent c’est parler de ce qu’on a et de ce qu’on n’a pas, des manques et des frustrations, des rêves mais aussi des impuissances. Les femmes cadre actuelles sont bloquées entre  « syndrome de l’imposteur », qui sous-entend de travailler deux fois plus qu’un homme pour valider ses compétences et une ère post #MeToo qui leur intime d’être fortes, de revendiquer et d’obtenir. On notera que ne pas se positionner est une nouvelle culpabilité qui pèse sur elles.

Quand les femmes sont enfin conscientes de ces différents freins et croyances cela permet de changer la donne. La prise de conscience de ces mécanismes permet de démultiplier sa puissance professionnelle et d’accéder à ce qui est pourtant tant mérité. C’est un nouveau pas vers l’émancipation des carrières qui se conjuguent au féminin.