Arme secrète du manager, aussi simple que puissante, l’écoute active est, aujourd’hui encore, trop peu utilisée. Manque de temps ? Manque de compétences ? Sous-estimation de son impact ? Peu importe les raisons, comprendre et utiliser cet outil changera votre façon de manager et la rendra plus efficace et bienveillante.

L’écoute active : avant tout, changez d’intention

La plupart des managers écoutent leurs salariés pour les aider à résoudre leur problème. L’intention est bonne, mais dans la majorité des cas, en se concentrant sur la solution, le manager ne prend finalement pas le temps de comprendre l’origine du problème. Dans 90% des cas, la préoccupation remontée par le salarié en premier lieu n’est jamais le véritable souci. La raison est assez simple : la plupart du temps, le salarié lui-même n’en a pas conscience. Il arrive aussi parfois qu’il n’ose pas l’avouer à son n+1.

Prenons un exemple : un collaborateur se plaint de ne pas être assez payé. Peut-être qu’en réalité, le vrai problème est qu’il souffre d’un manque de reconnaissance, qu’il attend de son manager plus de temps, de soutien. Peut-être n’en a-t-il pas conscience, ou, le cas échéant, n’ose-t-il pas en parler à son manager de peur de se le mettre à dos. L’intention derrière la posture d’écoute active sera d’aider le collaborateur à prendre conscience de son véritable problème.

L’écoute active exige de suspendre vos jugements

Second point : quand un manager écoute, il projette très souvent son propre vécu sur ce que lui raconte son salarié. Il se met à juger ce que son collaborateur lui dit, au risque de se couper de ce qu’il est en train de lui expliquer, et pense déjà à la solution alors que celui-ci n’a pas fini d’exposer son problème.

Reprenons notre exemple : le manager peut se dire que le collaborateur exagère, car l’entreprise paie déjà au-dessus des prix du marché. Le collaborateur le sentira et se refermera, en ne disant pas la vérité. De même pour la compensation par une prime : peut-être qu’un cas similaire avait été résolu avec succès grâce à cela. Mais dans ce nouveau contexte, si le problème vient d’un manque de reconnaissance, la prime ne le résoudra que temporairement avant qu’il ne réapparaisse. Chaque situation est différente et ne peut se résoudre par une seule et même réponse.

Dans le contexte professionnel, le silence peut parfois être mal perçu, surtout auprès des managers, qui sont censés fournir des réponses immédiates. Pourtant, les moments de silence peuvent s’avérer très positifs et impactants. Cela encourage le collaborateur à approfondir sa réflexion et oblige le manager à écouter sans juger, puisqu’il ne prend pas la parole. Cette approche évite également de tomber dans le piège du « paternalisme », dans lequel le manager exprime de la compassion, prodigue des conseils… De telles réactions risquent d’influencer le collaborateur à suivre ces conseils pour plaire au manager ou à adopter une attitude de victime s’il se sent compatissant envers lui.

Si l’on revient toujours à notre exemple : après avoir laissé le collaborateur parler de son salaire, il pourrait être tentant de lui parler d’une négociation ou d’une prime. Alors que si on ne dit rien, le collaborateur complétera sa pensée et parlera peut-être du manque de reconnaissance. La reformulation est une autre arme très puissante de l’écoute active. Il s’agit véritablement de reformuler mot à mot ce que dit la personne, comme un perroquet.
On appelle cela « l’effet miroir » : au-delà de se sentir totalement écouté, le collaborateur, en réentendant ses propres mots, modifiera probablement de lui-même ce qu’il a dit. Par ce mécanisme, le salarié peut parfois même, sans s’en rendre compte, trouver lui-même une solution.

L’empathie, dernière pièce de l’écoute active

La compassion, c’est souffrir avec l’autre, favorise un comportement de victimisation.
La sympathie, « un penchant naturel, spontané et chaleureux de quelqu’un vers une autre personne » (Larousse), ne va pas aider l’autre personne à aller au bout du problème.
L’empathie, c’est faire comme si on était l’autre, mais sans jamais l’être non plus, en gardant une distance salutaire pour éviter un transfert.
Un bon manager n’a pas forcément besoin d’être sympathique, il doit surtout être empathique, comprendre le besoin profond de son collaborateur à l’instant T. C’est tout l’enjeu de l’écoute active.

L’écoute active peut aller à l’encontre de croyances bien ancrées dans l’entreprise, comme le fait de ne pas parler de ses sentiments. Mais les sentiments ne sont-ils pas l’une des singularités de l’être humain par rapport à l’IA ? Certains pourraient avoir peur de passer pour des psys en pratiquant l’écoute active. Mais essayez, insistez et vous verrez que cela deviendra naturel et aura un impact quasi-immédiat ! Et si la discussion va trop loin pour vous sur le plan personnel, libre à vous de recadrer en disant que vous ne vous sentez pas être la bonne personne pour aborder ce type de sujet.