Et si le problème était la solution elle-même ?

«Tout ce qui était n’est plus, ce qui sera n’est pas encore. Ne cherchez pas ailleurs le secret de nos maux».
Cette phrase d’Alfred de Musset en introduction de son livre « Les confessions d’un enfant du siècle » (1836) s’applique parfaitement à la situation à laquelle nous sommes confrontés aujourd’hui. Du moins en ce qui concerne les rapports de collaboration entre les cadres et les entreprises. Ce changement, propre aux périodes de crise, est vécu par les intéressés comme une période difficile appelant des solutions provisoires, en attendant que les choses rentrent dans l’ordre et que tout redevienne comme avant. La gestion de crise consiste en l’occurrence à minimiser l’impact du changement, à le considérer comme provisoire et à continuer à appliquer les bonnes vieilles recettes qui ne fonctionnent plus, ne serait-ce que parce qu’on ne sait pas quoi faire d’autre. Or quand une solution ne fonctionne pas, la bonne question à se poser, si l’on en croit les systémistes (MRI de Palo Alto), est de savoir si le problème n’est pas la solution elle-même. En l’occurrence, les solutions du passé ne sont-elles pas le frein qui nous empêche de comprendre les changements de notre environnement et de nous y adapter?

Emploi cadre : l’avenir n’est plus ce qu’il était !

Les questions que je souhaite poser dans cette série d’articles sont les suivantes : La crise de l’emploi que nous vivons actuellement n’est-elle pas une simple scorie de l’histoire?  N’est-elle pas la manifestation d’un changement en profondeur des rapports de collaboration dont le sens nous échappe encore ? Et si rien ne devait plus jamais redevenir « comme avant » ? La question est posée, depuis un certain temps déjà, par ceux qui contestent, avec quelques bonnes raisons pour cela, la fuite en avant que constitue la recherche indéfinie de la croissance qui seule peut générer de l’emploi. La vie nous démontre la vanité de nos efforts pour endiguer (ou nier s’il ne nous convient pas) le changement. C’est une constante de l’âme humaine de  refuser le changement jusqu’à ce que cela ne soit plus possible. L’histoire le démontre, cette négation fait précipiter la chute des civilisations comme celle des entreprises.

Face aux changements de fond, la survie nécessite d’anticiper le changement, de lui donner du sens pour comprendre avant les autres le nouveau contexte qu’il va engendrer. Et garder ainsi un coup d’avance sur l’adversité quand ce n’est pas la transformer en opportunité.  Exactement le contraire de ce que font nos décideurs et nos têtes pensantes pour lesquels la ré-industrialisation de la France et le retour à la croissance sont les objectifs affichés. Vous ne trouvez pas que ce programme à des relents de négation du changement ? Veulent-ils nous persuader que la crise accouchera d’un Monde en tous points pareil à celui que l’on a connu pendant les 30 glorieuses, ou en sont-ils eux-mêmes persuadés ?

 

Les politiques ne voient pas plus loin que le bout de leurs échéances électorales, ils sont donc très mal placés pour gérer les tendances lourdes (à long ou moyen terme). Il est facile de critiquer les décideurs quand on est soi-même un observateur critique. Sommes-nous capables de faire mieux, de donner du sens au changement en cours et de nous en servir pour développer de nouvelles stratégies de gestion de carrière ? Qu’est-ce qui a changé ou est en train de changer dans les rapports salariaux entre les cadres et les entreprises ?

Une tentative d’élucidation des changements

Ces articles sont une tentative d’élucidation des changements en cours de la situation des cadres dans le jeu économique. Je n’ai nullement la prétention de détenir la vérité en la matière,  je cherche simplement à lancer un débat qui appelle des contributions voire des contradictions. Je compte sur vous, lecteurs de Cadre et Dirigeant Magazine, pour les commenter, les enrichir et les discuter. Si au terme de cette confrontation, nous parvenons à une meilleure représentation du contexte et des changements en cours, sans doute pourrons-nous aussi y voir plus clair sur les stratégies permettant d’y faire face. Dans le second article à paraître de cette série j’évoque les tendances lourdes de l’évolution du contexte socio-économique, les plus susceptibles d’impacter la situation des cadres salariés. Les articles suivants seront consacrés à la façon dont ces évolutions pourraient impacter la situation des cadres salariés et à la recherche d’approches susceptibles de leur permettre d’en minimiser l’impact négatif, voire d’en tirer parti.