Tous les métiers de service ont été mis à rude épreuve lors de la pandémie de Covid-19. Cette crise sanitaire imprévisible a surtout mis en évidence les besoins accrus en hygiène dans notre société, en particulier dans le monde de l’entreprise.
Crise du Covid-19 oblige, l’hygiène est enfin devenue un sujet de discussion en France. Et on ne peut que s’en réjouir tant les Français avaient auparavant la triste réputation d’être sales. L’épidémie du printemps 2020 a en effet changé la donne : la chasse à la contagion a remis au goût du jour les mains savonneuses et la désinfection des lieux de vie et de travail. Au début de la crise, une étude du cabinet McKinsey a ainsi souligné l’apparition de l’hygiène parmi les préoccupations nº1 des consommateurs : « Les changements les plus importants, avance l’étude, incluent des changements spectaculaires dans les canaux de consommation, des préoccupations nouvelles ou accrues en matière d’hygiène et de sécurité des consommateurs. » Bien évidemment, cette prise de conscience a été la bienvenue.

Un enjeu de réputation 

Désormais, l’hygiène est devenue tendance. Les entreprises du secteur de l’hygiène, du nettoyage ou de la blanchisserie peuvent enfin apporter leurs lettres de noblesse à leurs métiers. Ce qui a eu un impact évident sur leurs clients. « Sans aucun doute, la crise sanitaire a réorganisé les priorités des dirigeants d’entreprise et des collaborateurs, assure Laurence Henry, responsable de clientèle nationale de Tork (Groupe Essity), qui commercialise des produits d’entretien et de nettoyage professionnels. L’hygiène, qui était jusqu’alors nécessaire, est devenue primordiale. Il en va aujourd’hui de la sécurité des personnes mais aussi de leur productivité et de leur bien-être au travail. » La propreté s’est donc imposée comme un aspect essentiel de la vie des entreprises, en termes de sécurité, de confiance et d’image de marque.

Qu’elles opèrent en coulisses ou au contact direct du public, les entreprises du secteur sont surtout focalisées sur la satisfaction du client final. La blanchisserie industrielle par exemple, qui dessert l’hôtellerie ou le monde hospitalier, est à la recherche permanente du sans-faute. « Nous sommes sur un marché où la dimension industrielle n’est qu’un moyen pour produire le service à l’utilisateur final, souligne Éric Roussel, directeur général de Kalhyge, une ETI de référence dans le domaine de la location-entretien d’articles textiles et la commercialisation d’équipements d’hygiène. Notre positionnement est donc tout à fait particulier, à savoir en B-to-B-to-C : nous livrons des produits à des entreprises ou des collectivités, qui, à leur tour, les transmettent pour usage à leurs collaborateurs, leurs patients, leurs clients. Nous souhaitons apporter de la valeur au client B : de la valeur grâce à nos produits et services afin de contribuer à son activité, sa capacité à recruter et conserver ses collaborateurs, apporter de la sécurité et du confort ; et nous nous voyons comme un créateur de bien-être pour le client C. » Pour ces professionnels de la propreté, dont la réputation est en jeu à chaque livraison de linge, seule la qualité compte.

Si certaines entreprises œuvrent dans les coulisses comme le fait Kalhyge, d’autres sont au contact direct des clients et utilisateurs finaux. Surtout dans le domaine du nettoyage des lieux de travail. C’est par exemple le cas d’ISS France, filiale d’un groupe danois de nettoyage présent dans 30 pays. « La première de nos missions, c’est la propreté. Avec la crise sanitaire que nous avons vécue, nous en sommes tous conscients, avance Judith Jiguet, présidente de ISS France. Notre métier, c’est d’être chez nos clients : très concrètement, nous travaillons au bénéfice des salariés de nos clients, ou au bénéfice des clients de nos clients dans les grands magasins par exemple, mais aussi des patients ou des usagers de nos clients, dans les hôpitaux ou les trains. Nous permettons ainsi à nos clients de se concentrer sur leur cœur de métier. » Qu’elles soient au contact direct de la clientèle finale ou non, les entreprises dédiées à l’hygiène le savent : leur bien le plus précieux, c’est la satisfaction de leurs clients. Synonyme de bonne réputation, pour eux comme pour elles.

Des métiers techniques reconsidérés 

Pour asseoir leur propre réputation, ces entreprises mettent en avant à la fois la technicité de leurs métiers, et les contraintes auxquelles elles sont soumises. Là aussi, l’effet de la crise sanitaire est palpable. Par exemple, comme dans d’autres secteurs d’activité, le Covid-19 a accéléré la digitalisation et changé le rapport au travail. Elle a également amélioré le regard que le grand public porte sur ces travailleurs de l’ombre, autrefois déconsidérés et dont le rôle s’est avéré crucial. Plus question aujourd’hui de « cacher » les femmes de ménage. « C’est exactement ce que nous voulons changer, assure Judith Jiguet. Avant le Covid-19, cela arrangeait tout le monde que les dames venant ramasser les poubelles viennent tard le soir ou très tôt le matin. Le Covid-19 a renversé la donne : nos clients et leurs salariés ont eu besoin d’une réassurance, ils ont eu besoin d’être certains que les lieux qu’ils occupaient étaient sûrs. De ce fait, nous avons rendu encore plus visibles nos agents chargés du nettoyage et de la désinfection. C’est pour nous l’occasion de réinventer le métier. »

Malgré tout, le secteur de l’hygiène obéit à des règles et à des contraintes très spécifiques. L’obtention de labels constitue évidemment un gage de sérieux et de crédibilité pour les clients de ces entreprises, pour qui la qualité du service reste le critère nº 1 du choix. Chez Kalhyge par exemple, Eric Roussel se veut très attentif à tout ce qui pourrait avoir un impact sur l’activité de son entreprise, notamment dans le cadre hospitalier : « Tous nos sites sont certifiés RABC et font l’objet d’un suivi indépendant afin de garder cette certification, assure le dirigeant du nº 2 français de la blanchisserie industrielle. Il s’agit d’une norme spécifique liée au secteur de la santé. Nous avons un travail de fond à mener avec nos fournisseurs, car il existe des contraintes très importantes pour tout ce qui a trait aux matières premières, à la production et à la logistique. Nous devons redoubler d’efforts avec eux. »

La crise sanitaire du Covid-19 a donc largement impacté le secteur de l’hygiène. Sur le plan de l’organisation du travail, mais aussi sur la place du digital. Pour Laurence Henry chez Tork, « les nouvelles technologies vont permettre aux gestionnaires de site de booster l’efficacité des équipes, tout en améliorant la satisfaction des clients finaux. Parce que les agents d’entretien ont de plus en plus de tâches à accomplir, ces derniers ont besoin de s’appuyer sur des solutions intelligentes pour mieux allouer leur temps et leur énergie, dans une logique d’efficience. Nous sommes convaincus que le nettoyage professionnel basé sur les données représente l’avenir du secteur. » La digitalisation, que de nombreux pans de l’économie revendiquent, s’applique donc elle aussi à l’hygiène.

RSE et hygiène font bon ménage 

Tous ces paramètres conjugués – label de qualité, digitalisation, rapport au travail modifiés – se cristallisent aujourd’hui autour de la stratégie RSE des entreprises du secteur, et de celle de leurs clients. « Il existe bien sûr une dimension sociétale à nos métiers, remarque Éric Roussel. Nous évoluons dans un monde de plus en plus attentif au respect des normes RSE. Et c’est une très bonne chose. Il me semble fondamental de s’inscrire pleinement dans cette dynamique de responsabilité sociale, mais également environnementale de l’entreprise, avec des engagements qui vont au-delà des discours notamment en matière de recyclage du textile et plus particulièrement des vêtements de travail. Kalhyge est le partenaire d’une très belle opération de recyclage de vêtements de travail pour faire de la fibre de seconde main et donc participer pleinement à un écosystème français unique en son genre. » L’économie circulaire est en effet au cœur des nouvelles pratiques des professionnels de l’hygiène. « Aujourd’hui, le gestionnaire de site doit accomplir sa mission, avec une vision durable, souligne Samy Ben Jazia, responsable de la communication pour l’Europe du sud chez Tork. Pour ce faire, différents leviers se démocratisent dont notamment : la consommation durable et l’économie circulaire. Dans les entreprises, cela va se traduire par l’utilisation de produits permettant de minimiser la consommation et le gaspillage, offrant ainsi un impact environnemental réduit et une meilleure rentabilité. »

Cela dit, la rentabilité à tout prix n’est plus le Graal recherché par ces entreprises. « Nous espérons tous que la crise sanitaire soit un jour derrière nous, mais nous ne reviendrons pas à la situation antérieure, estime Judith Jiguet chez ISS. Il faut que nous engagions avec nos clients une discussion partenariale pour des contrats à responsabilité augmentée, pour ancrer la RSE dans la durée, pour proposer non pas le meilleur service au meilleur prix, mais le meilleur service au juste prix. Ce sera un partenariat gagnant-gagnant en termes de RSE pour nos clients, mais aussi pour nos salariés. » Le meilleur service au juste prix, donc. D’autant qu’une bonne réputation, elle, n’a pas de prix.