De la musique aux mathématiques, à mille lieues du modèle familial

Pour parvenir au prestigieux statut de directrice du laboratoire Facebook, Joëlle Pineau n’a pas ménagé ses efforts. En 1994, à 20 ans, étudiante en musique, elle est en même temps violoniste à l’Orchestre symphonique d’Ottawa. Attirée depuis toujours par la puissance des mathématiques, elle change de voie et rejoint l’Université de Waterloo (Ontario), à mille lieues des modèles qu’elle côtoie habituellement : « dans ma famille, il n’y avait pas de chercheurs, c’était plutôt des musiciens, des fonctionnaires, ce genre de profils », aime-t-elle à raconter en interview.

Une carrière dédiée à l’informatique et l’enseignement

Après ces débuts musicaux, elle passe un baccalauréat en génie du design des systèmes (mathématiques et robotique) qu’elle l’obtient en 1998. Commence une passion dévorante et continue pour les algorithmes et le machine learning (apprentissage des machines). Elle valide un doctorat en robotique à l’université de Pittsburgh (États-Unis) et découvre vers la fin de ce cursus le domaine qui deviendra sa science favorite, l’intelligence artificielle. Devenue professeure agrégée, elle retourne à Montréal, sa ville de cœur, pour enseigner à l’université McGill, et en parallèle, est codirectrice du « Reasoning and Learning Lab », laboratoire d’apprentissage et de raisonnement en matière robotique, fonction qu’elle occupe toujours fonction aujourd’hui, malgré sa nomination chez Facebook. Elle suit même des étudiants à McGill, alors qu’elle a cessé d’enseigner « je ne voulais pas les abandonner ni abandonner toute ma recherche universitaire, explique-t-elle, (…) ces travaux prennent des années. De plus (…) j’ai beaucoup de plaisir à travailler avec eux [les étudiants]. » (Interview L’Express)

Des travaux sur le dialogue intelligent

En 2017, la chercheuse à 45 ans arrive à la tête du FAIR, le laboratoire de Facebook dédié à l’intelligence artificielle basé à Montréal. « Mon travail consiste à découvrir de nouveaux modèles mathématiques ou algorithmes, par exemple pour créer des systèmes de dialogue intelligents, explique-t-elle. Les systèmes de ce type que nous avons aujourd’hui n’ont pas beaucoup de profondeur, de réflexion, de vécu ; l’échange reste en surface. Avec mon équipe nous faisons de la recherche fondamentale pour réussir à aller plus loin. » (Interview L’Express). Aujourd’hui, les technologies basées sur le dialogue servent surtout les assistants vocaux et les chatbots.

Un soutien aux femmes dans le milieu Tech’

Joëlle Pineau est aussi fervente défenseuse de la place des femmes dans le milieu Tech, encore majoritairement occupé par les hommes (par exemple en France à Epitech – qui est une grande école informatique – il n’y a que 4 % de femmes). Elle participe au « Women in Machine Learning », une série de conférences destinées à présenter les travaux des chercheuses en informatiques.

Une femme reconnue pour ses travaux dans le domaine médical

Aujourd’hui, Joëlle Pineau est reconnue comme pionnière dans de nombreux domaines informatiques, notamment dans les applications dédiées à la santé et aux données médicales. Avec ses étudiants à McGill, elle travaille, entre autres, sur des solutions d’intelligence artificielle pour lutter contre les maladies du cœur et l’épilepsie. Si le deep learning (l’apprentissage profond des machines – dans la lignée du machine learning), sa spécialité, vous intéresse, vous pouvez suivre ses nombreuses conférences sur le sujet, disponibles sur la Toile en provenance du monde entier, ses interventions étant très prisées, d’autant plus depuis qu’elle supervise le laboratoire de recherche et développement de Facebook dédié à l’intelligence artificielle.