Dix ans après l’instauration de quotas en application de la « loi Copé-Zimmermann », l’objectif de représentation équilibrée entre femmes et hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance des grandes entreprises françaises est en passe d’être atteint. Les femmes qui n’étaient que 10% en 2011 sont désormais représentées à plus de 40% au sein de ces instances.

En première place européenne, la France montre la voie, distanciant les autres pays moins avancés sur ce sujet. Le pourcentage de sièges de conseil d’administration occupés par des femmes n’est que de 26,2 % Allemagne, 19,2 % en Espagne, 22,7 % au Royaume Uni. En France, les femmes ont également de deux à trois fois plus de chances d’accéder à ces postes qu’aux Etats-Unis (17,6 %) ou à Hong Kong (11,4 %)[*].

Malgré cette évolution positive, le rééquilibrage s’arrête en France aux portes des conseils d’administration. L’effet de ruissellement qu’on pouvait espérer vers les organes décisionnels de l’entreprise n’a pas encore eu lieu. Dans les instances dirigeantes, comités de direction ou comités exécutifs, l’absence de femmes reste encore significative. Seul un quart d’entre elles, toutes tailles d’entreprises confondues, a réussi à s’y faire une place dans les instances dirigeantes, sans véritable nuance entre PME, ETI et Grandes Entreprises*.

Face à ce constat, une proposition de loi visant à « Accélérer l’égalité économique et professionnelle » est en cours de discussion à l’Assemblée Nationale, elle prévoit notamment en son article 7, d’étendre les quotas aux « 10 % des postes à plus forte responsabilité » au sein des entreprises de plus de 1000 salariés, afin d’atteindre une proportion minimale de 30 % de femmes parmi ces postes d’ici 2027 et de 40 % en 2030.

Les quotas, un outil incontournable

Cette volonté de recourir aux quotas semble donc être, pour nos dirigeants, l’outil indispensable qui permettra de rééquilibrer la parité dans les équipes de direction. Nombreux sont ceux qui y étaient jusqu’alors opposés et semblent avoir désormais rallié cette position.

L’Allemagne a d’ailleurs retenu cette solution pour accélérer le changement, et devrait bientôt imposer la présence de femmes dans les conseils d’administration des grandes entreprises. Cette réforme d’envergure est l’une des dernières de la mandature Merkel qui s’achève en septembre. Mais l’Allemagne n’a pas encore passé le cap d’imposer des quotas dans les comités de direction ou comités exécutifs.

Des modes de pensées appelés à changer

Comme pour les conseils d’administration, les quotas ne seront sans doute pas la solution suffisante ni la plus adaptée pour instiller dans les autres niveaux de l’entreprise l’élan d’une parité nouvelle. Or cet élan ne peut être l’apanage des seuls grands groupes ou entreprises cotées. Il faut compter avec les PME : près de 4 millions en France pour 6,3 millions de salariés. L’objectif peut être atteint si on le compare avec le ratio allemand : 3,6 millions de PME en Allemagne pour 31,3 millions de salariés.

Mais la réalité économique est diverse et complexe. Les entreprises hors grands groupes ne seront à même de compter des femmes parmi leurs dirigeants que si elles parviennent à recruter en externe. Or, constituer un « vivier interne équilibré » de talents à haut potentiel est encore pour bon nombre d’entre elles une voie à explorer. Certains secteurs d’activités, massivement représentés par des hommes, comme la logistique, le BTP ou l’IT, attirent encore insuffisamment de femmes. En France, les femmes ne représentent encore qu’un quart des effectifs des écoles d’ingénieurs et 17 % des ingénieurs en poste. Ces différences sont encore plus marquées pour certaines spécialités : elles sont moins de 10 % en électronique, génie civil ou mécanique. Ainsi, au-delà des quotas, les entreprises ont avant tout besoin d’une évolution constructive des modes de pensée, d’une adaptation des modèles managériaux et de la culture d’entreprise.

L’avancement de la parité passera bien par cette nouvelle frontière de l’entreprise : que les femmes, soutenues par leurs homologues masculins, osent davantage. C’est un enjeu de société.

La parité : une chance pour un modèle managérial plus vertueux

Si la parité hommes-femmes ne peut être obtenue sans la participation active des hommes sur la question, il s’agira avant tout de créer tous ensemble le cadre offrant aux femmes et aux hommes les mêmes opportunités de participer aux décisions au sommet des organisations.

Mais les échanges qu’Exec Avenue a conduits ce printemps avec les dirigeants d’entreprise tendent aussi à démontrer que faire progresser la parité dans les équipes de direction est bien plus qu’une « case à cocher ». C’est une démarche. Les dirigeants sont les premiers à reconnaître les bénéfices d’un tel mouvement vers l’équilibre. Pour eux, c’est la chance d’un modèle managérial plus vertueux, plus transversal, plus participatif et surtout porteur de ce consensus si profitable à la performance collective.*

Sources
-Women in the boardroom : A global perspective (6e édition), Deloitte Germany’s special path : The Share of Women on DAX Executive Boards declines during the Crisis, AllBright Foundation 
Enquête réalisée par Exec Avenue en mars 2021, auprès de 411 dirigeants de PME (37%), ET (41%) et Grandes entreprises (22%),
Exec Avenue